Ils sont déterminés à faire éclater la vérité. Les familles des disparus de la tragédie nationale ont exprimé, hier, leur détermination à faire éclater la vérité sur le sort qui a été réservé aux leurs à l'occasion de la visite d'Etat du président français Jacques Chirac en Algérie à partir d'aujourd'hui. «La refondation des liens entre l'Algérie et la France ne se fera pas sans nous», a martelé, hier, au siège de l'association SOS Disparus. Mme Nacima Yous, présidente de ce collectif. «Aujourd'hui, (hier ndlr), ils sont en train de maquiller Alger, mais nous sommes là», ironise-t-elle et d'ajouter: «Nous avons souffert du colonialisme français et nous souffrons aujourd'hui du colonialisme des militaires.» Lors d'une conférence de presse animée, hier, en présence de dizaines de mères et d'épouses de disparus et de Me Ali Yahia Abdennour, président de la Ligue algérienne de défense des droits de l'Homme (Laddh), Mme Yous a fait un long rappel du combat de ces familles depuis cinq ans pour arracher le droit à la parole. S'agissant de la visite du président français en Algérie, objet de ce point de presse, elle dira encore: «Au lieu de réunir les deux Chambres du Parlement, au Club des Pins, Chirac devrait nous parler à nous», et d'émettre de sérieux doutes sur la possibilité de tourner la page entre les deux pays en ignorant la question des disparus. Me Ali Yahia Abdennour dira à ce propos: «La France doit prendre position par rapport aux disparus (...). Il faut une prise de position publique sinon, c'est la France coloniale qui continue.» Le Président Bouteflika est également interpellé pour «dire la vérité», au même titre, d'ailleurs, que «les commanditaires de l'armée». S'agissant des militaires, l'avocat des disparus déclare: «La justice algérienne peut-elle poursuivre un général?» Le plus grave aux yeux de Me Ali Yahia, c'est que «la justice est au service de l'Exécutif et que le pouvoir législatif est minorisé». Toutefois, le président de la Laddh dira, à l'adresse des responsables civils et militaires de ce pays, qu' «il vaut mieux dire la vérité maintenant et avoir la possibilité de se défendre devant les juges que d'être condamné par l'Histoire, à titre posthume», citant en exemple ce qui est arrivé récemment à la mémoire du martyr Abane Ramdane. Plusieurs témoignages d'enlèvements «par les forces de sécurité» ont été relatés durant ce point de presse. Idem pour les différentes contradictions qui ont émaillé la gestion de ce dossier épineux depuis 1997. Enfin, il ressort de ce qui s'est dit tout au long de cette conférence de presse que le problème des disparus en Algérie reste en l'état et que les familles refusent catégoriquement de «monnayer» leurs enfants. Le triptyque des familles de disparitions forcées, qu'elles imputent d'ailleurs, entièrement à l'Etat, est la vérité, l'application de la loi et une volonté d'aller jusqu'au bout, à savoir le jugement des assassins et de leurs commanditaires.