Le chef de l'Etat permet aux forces politiques qui le soutiennent d'être définitivement fixées sur ses intentions. Dans un entretien ac-cordé à la radio française Europe 1, Bou-teflika est revenu sans complexe sur de nombreuses questions, notamment celle relative à la prochaine échéance électorale. A ce propos, interrogé sur son propre avenir politique, il a dit qu'il n'était «pas fatigué». «En dehors de servir mon pays, je ne sais rien faire d'autre», a-t-il déclaré, laissant entendre qu'il pourrait briguer un nouveau mandat. «C'est une décision souveraine du peuple algérien», a-t-il dit, précisant toutefois: «Je crois que ça vaut la peine de continuer». Décodées, les phrases du Président de la République renseignent assez bien sur son intention de ne pas rendre son tablier, bien au contraire. Aussi, est-on amené à penser que Bouteflika a officieusement annoncé sa candidature à la prochaine élection présidentielle. Dans «ça vaut la peine de continuer», on y lit une certaine satisfaction du travail accompli depuis son investiture à la tête de la République, d'autant que la déclaration a été faite le jour de l'aboutissement d'un long parcours politico-diplomatique entamé au lendemain de son installation à El-Mouradia. En effet, le rapprochement historique entre Alger et Paris constitue en soi l'une des plus grandes réussites du premier mandat de Bouteflika. Les 14 mois qui nous séparent de la prochaine échéance électorale seront mis à profit par les deux gouvernements pour accélérer les réformes et engager une véritable politique d'investissement dans tous les secteurs d'activité économique. Une période relativement courte, mais qui peut suffire à la mise en place de tous les mécanismes de la relance et, pourquoi pas, cueillir les premiers fruits de la relance tant souhaitée par l'écrasante majorité du peuple algérien. Une course contre la montre est donc engagée par les deux chefs d'Etat algérien et français, qui sont, quelque part, condamnés à rester au pouvoir dans leurs pays respectifs pour mener à son terme le processus enclenché en juin 2000 et qui commence à se matérialiser à la faveur de la visite d'Etat de Jacques Chirac en Algérie. Autant dire que Bouteflika dispose d'un atout de taille dans le cadre de la prochaine campagne électorale. Les résultats du réchauffement historique des relations entre l'Algérie et la France sont incontestablement une oeuvre de l'actuel locataire du palais d'El-Mouradia, ce qui constitue un argument de taille qui plaide pour lui. Plus que cela, le chef de l'Etat, en n'excluant pas sa candidature, permet aux forces politiques qui le soutiennent d'être définitivement fixées sur ses intentions. Aussi, est-il attendu, de l'avis de nombreux observateurs, un resserrement des rangs de la majorité présidentielle, dont les partis organisent leur congrès dans le courant de cette année. Le FLN et le RND, disposant, à eux seuls, de près de la moitié du réservoir électoral, serviront, sans doute, de relais très efficace au Président de la République lors de la campagne pour la présidentielle. D'un autre côté, est-il besoin de souligner qu'il n'existe, à l'exception de Ahmed Taleb Ibrahimi, aucun autre homme politique algérien à même de le concurrencer sérieusement. Djaballah, Sadi et Nahnah ne disposent pas de relais assez puissants au sein de la société pour leur permettre de jouer dans la cour des grands. Autant dire, qu'en rendant publique, même de manière officieuse, son intention de briguer un second mandat, le chef de l'Etat ne s'y prend pas trop tôt. Bien au contraire, cette annonce intervient à un moment propice au sens qu'elle est faite dans un climat empreint d'un grand enthousiasme, renforcé par la consécration d'un travail de longue haleine véritablement porteur d'espoir pour la société. Le rapprochement algéro-français a été rendu possible, disent les mêmes observateurs, grâce à la démarche de concorde civile initiée par le Président de la République qui a reçu un accueil favorable au niveau des plus importantes capitales du monde. En fait, l'on suppose que Bouteflika mettra en exergue cet état de fait pour ressortir la cohésion de la politique qu'il mène depuis son arrivée à la magistrature suprême. Son premier mandat, qui arrive à son terme, est celui de la déghettoïsation de l'Algérie (Lire l'article de Ali Oussi), et le lancement des principales réformes tendant à la modernisation du pays. Bouteflika, qui a encore du pain sur la planche, devra consolider tout le travail accompli.