A Doha, les pays islamiques n'ont fait que constater leurs faiblesses face à la situation actuelle. L' Organisation de la Conférence islamique (OCI) a été convoquée en sommet extraordinaire pour se pencher à son tour sur l'épineux cas irakien. Mais que peuvent en vérité des pays qui reconnaissent eux-mêmes leurs faiblesses actuelles et le peu de moyens dont ils disposent pour influer sur le cours des choses?. C'est en tout état de cause ce que, d'emblée, l'émir du Qatar, cheikh Hamad Ben Khalifa Al-Thani, président en exercice de l'OCI, a tenu à affirmer devant quelques-uns de ses pairs, tout en soulignant les «circonstances exceptionnelles dans lesquelles se tient la réunion». En effet, dans son discours d'ouverture, cheikh Hamad a fait valoir que les pays membres de l'OCI «n'avaient pas de pouvoir de décision sur l'Irak», soulignant toutefois qu'ils «pouvaient peser en faveur d'une solution pacifique». Sur les 57 membres de l'OCI, seuls 7 d'entre eux étaient représentés par leurs chefs d'Etat, notamment l'Egyptien Hosni Moubarak, et le vice-président irakien Ezzat Ibrahim. Cette défection des personnalités islamiques, de premier plan, est suffisamment indicative du peu de crédit que ses propres membres accordent à l'OCI de réussir là où d'autres peinent à faire entendre la voix de la raison à des Américains décidés à en découdre. Comme les sommets qui l'ont précédé, de la Ligue arabe et des Pays Non-alignés, celui de l'OCI n'avait pu que faire le constat de la faiblesse qui est celle des pays émergents. Les représentants des pays islamiques, présents à Doha, ont certes tous plaidé pour la paix et plus singulièrement soutiennent une solution pacifique et équitable du désarmement de l'Irak, rejetant une frappe militaire contre ce pays. Tous? Certes non ! La fausse note aura été l'intervention du ministre d'Etat koweïtien aux Affaires étrangères, cheikh Mohamed Sabah Al-Sabah, -dont le pays accueille plus de 110.000 soldats américains-, qui mit le feu aux poudres en affirmant que «le temps n'est plus à un règlement pacifique» provoquant l'ire du vice-président irakien Ezzat Ibrahim qui répliqua vertement. L'auguste assemblée a alors pu constater le langage «robuste» et les «noms d'oiseaux» échangés par les deux hommes. L'altercation aura été plus violente que celle ayant opposé, la semaine dernière, au sommet arabe de Charm El-Cheikh le dirigeant libyen Maâmar El Gueddafi, au prince héritier saoudien Abdallah. Ce qui souligne les divergences irréfragables qui divisent actuellement le monde arabe. Quoique consacré à l'Irak, le sommet de l'OCI a eu une pensée pour le martyre du peuple palestinien. Ainsi, l'émir du Qatar, cheikh Hamad, s'est dit, dans le discours d'ouverture, «alarmé (par) la dégradation de la situation dans les territoires palestiniens» regrettant «l'absence» du président Arafat interdit de sortie par Israël. Cheikh Hamad appelle les pays de l'OCI à «travailler avec la communauté internationale, pour mettre fin à la guerre de destruction contre le peuple palestinien et ses dirigeants et relancer la recherche de la paix». Dans son message au sommet, le président Yasser Arafat, tout en accusant Israël de refuser la paix, s'exprime pour une solution pacifique en Irak affirmant: «Nous soutenons tous les efforts régionaux et internationaux pour une solution pacifique dans le cadre des Nations unies». Il reste seulement à en convaincre les Etats-Unis prêts à se passer d'un mandat de l'ONU pour attaquer l'Irak. Dans leur communiqué final, les pays de l'OCI réaffirment leur «rejet total» d'une frappe contre l'Irak, appelant la communauté internationale à «soutenir les efforts islamiques visant à empêcher la guerre». La déclaration de l'OCI affirme par ailleurs «le refus des pays islamiques de participer à toute action militaire» en Irak. Appelant à «préserver l'unité territoriale» de ce pays, l'OCI s'est félicitée d'autre part de l'appel de la communauté internationale à «la poursuite des inspections des armements irakiens et à celle des efforts diplomatiques pour une solution pacifique» de la crise irakienne.