Il s'agit là d'une véritable stratégie de la chasse aux policiers. Au moins 36 ont été ciblés depuis le début de l'année. Un policier a été assassiné dans la nuit de vendredi à samedi sur la route de Hamala, à la sortie sud de la ville de Batna, par un groupe terroriste armé. La victime a été délestée de son arme et de ses pièces d'identité. Ce nouvel attentat est le trente-sixième perpétré contre des policiers depuis le début de l'année, si l'on se réfère aux différentes informations rapportées par les correspondants locaux de la presse nationale. Les régions placées à haut risque pour le corps de police demeurent toujours celles du Centre (Alger et Tizi Ouzou), où au moins huit à dix policiers (souvent l'information est tenue hors médiatisation) ont été abattus. Les villes de l'Est (Tébessa, Batna, etc.) restent tout aussi dangereuses. Il y a près de deux mois, nous assistions à un phénomène tout à fait nouveau, ou, pour le moins, qui a ressurgi de fort inquiétante manière dans la capitale: c'est l'attentat commis en plein centre urbain contre des policiers. L'attentat en plein jour sur le policier d'El-Harrach avait ouvert ce chapitre. Touché par deux balles, celui-ci a été tué sur le coup. Quelques jours après, un autre policier est abattu à Clauzel, en plein jour, et en plein centre-ville. Cette dernière semaine, deux policiers ont été ciblés. Le premier au niveau d'El-Alia, le second dans une cafétéria à Zabana, toujours à Alger. Les deux tentatives d'attentats ont été déjouées, pais il y a eu le fait à retenir, c'est que pour le second cas, le policier était en tenue de ville et les deux jeunes qui l'ont ciblé le connaissaient très bien pour venir tirer sur lui. Jeunes, habillés comme monsieur-tout-le-monde, non fichés, non répertoriés, ces jeunes desperados urbains commencent à constituer une véritable hantise pour la Dgsn. Dans la région kabyle, après la «délocalisation» de la gendarmerie, la police est ostensiblement ciblée. Plusieurs policiers ont été tués dans la ville de Tizi Ouzou et sa proche périphérie. L'assassinat dans des faux barrages dressés à la lisière des villes reste le modèle type, mais on assiste à des scènes de lynchage en ville où le policier est pris à parti par des jeunes exaltés. L'assassinat à l'arme blanche d'un policier venu embarquer un jeune délinquant est encore en instruction au niveau du tribunal de Tizi Ouzou, et il y a fort à craindre, au vu des tensions sociales qui persistent, d'y (re) voir encore des scènes pareilles. Dans la wilaya de Boumerdès, des attentats contre des policiers ont été enregistrés durant le ramadan et le mois d'après. La neutralisation d'un dangereux terroriste, en plein centre-ville, a atténué cette vague d'attentats sans pour autant dissiper les appréhensions. En fait, il n'est qu'à voir les policiers munis de lourds gilets pare-balles pour se convaincre que le danger n'est pas tout à fait dépassé et pour établir une bonne fois pour toutes que la Direction de la sûreté nationale redoute encore la résurgence de la guérilla urbaine. Dans un récent entretien accordé à la Télévision nationale, le patron de la police avait parlé d'une «meil- leure capacité d'adaptation et de dissimulation» de la part de terroristes en milieu urbain et avait confirmé que tout danger n'était pas tout à fait écarté, bien que l'éclaircie sécurité ait tendance à manifester le contraire. Au milieu de cette campagne d'attentats, le Gspc agit avec une égale performance à Alger, Boumerdès, Tizi Ouzou, Batna et Jijel. La stratégie de la chasse aux policiers comme aux autres corps de sécurité fait consensus dans la direction de l'organisation et il y a fort à parier que beaucoup d'autres policiers en feront les frais dans les jours à venir.