Les Etats-Unis ont appelé, jeudi, tous les pays à fermer les ambassades et à expulser les diplomates irakiens tout en gelant les avoirs du gouvernement irakien. Pourtant, certains pays ont refusé de se plier à ce nouveau diktat américain. Les raisons divergent d'un pays à un autre. C'est ainsi que le président russe, Vladimir Poutine, a considéré cette injonction dans les affaires internes du pays comme «lourde de conséquences difficilement prévisibles» et allait notamment favoriser la montée de l'extrémisme dans le monde, au cours d'une réunion au Kremlin. Une telle demande «n'aurait aucune force légale et notre réaction serait sans conséquence», a, pour sa part, déclaré le ministre des Affaires étrangères, Igor Ivanov, affirmant ne pas avoir reçu, jusqu'à l'heure, une telle demande. Mais la vraie raison reste strictement d'ordre économique, du fait que des compagnies pétrolières russes, notamment le numéro un Loukoil, ont conclu d'importants contrats avec Bagdad et craignent qu'ils ne soient ignorés par un futur régime irakien mis en place par les Américains. Une demande à laquelle l'Algérie, qui représente les intérêts irakiens à Washington, refuse de se plier, a affirmé vendredi le ministre algérien des Affaires étrangères Abdelaziz Belkhadem. «L'Algérie est un pays souverain qui établit des relations diplomatiques avec le pays qu'il veut et qui rompt ses relations avec le pays qu'il veut», a affirmé M.Belkhadem qui précise que l'Algérie n'avait «reçu aucune demande en ce sens» des Etats-Unis, soulignant que l'Algérie «n'a pas à recevoir d'instruction de quiconque». «Nous décidons nous-mêmes souverainement des pays avec lesquels nous entretenons des relations», a-t-il encore affirmé. Têtes de file du front européen anti-américain, la France et l'Allemagne ont contesté toute injonction dans les affaires intérieures de leur pays. Pour le porte-parole du ministre français des Affaires étrangères, «la France considère qu'une telle demande relève de sa souveraineté. Il n'y a pas à l'heure actuelle de raison d'y donner suite». Même si Paris et Bagdad n'entretiennent plus de relations diplomatiques formelles depuis la guerre du Golfe (1990-91). Alors que Berlin, même si elle a expulsé quatre diplomates irakiens considérés persona non grata pour s'être livrés à des «activités incompatibles avec le statut de diplomate», a néanmoins refusé d'expulser les diplomates irakiens présents sur son sol, comme l'ont réclamé les Etats-Unis. Rejoignant ces pays la Hongrie et l'Iran, de même que le Canada, le Liban, les Pays-Bas et la Suède se sont déclarés solidaires du régime irakien. Sentant le vent tourner après cinq jours d'hostilités, l'Espagne, qui a pourtant soutenu l'action militaire, n'a pas l'intention de procéder à une telle mise en demeure américaine. Une façon de se rapprocher et de regagner l'estime de ses vraies alliés européens, comme quoi, parfois, l'intérêt justifie la volte-face. A l'heure actuelle, la Jordanie est le seul pays à s'être plié aux exigences américaines en expulsant le conseiller commercial Ali Joumaa, l'adjoint du conseiller culturel Kassem Al-Issawi et trois employés du consulat Ghazi Khalil, Abdel Wahab al-Machhadani et Abdel Razak Ayad, considérés persona non grata.