La pêche constitue un secteur d'activité pouvant aisément servir l'intérêt des deux pays. Hier, les programmateurs de notre séjour à Nouakchott ont eu l'idée lumineuse en organisant une visite au port de pêche de la capitale mauritanienne. Construit par les Japonais il y a quelques années, le port de Nouakchott, simple dans ses structures, reflète bien l'intérêt que les Nippons accordent à la pêche sur cette côte de l'Ouest africain. Le courant chaud baignant celle-ci depuis la nuit des temps, l'a transformée à la longue en vivier où des millions de poissons de toutes tailles viennent se nourrir avant de sombrer dans les filets des pêcheurs. Paradis où le poisson est roi, des pêcheurs pour les prendre il en vient de toutes parts à Nouakchott, certes, mais surtout à Nouadhibou où Japonais, Russes, Espagnols, Français et combien d'autres pavillons venus d'Europe et d'ailleurs se partagent des centaines de tonnes de poissons par jour. Sauf, bien entendu, les Algériens qui préfèrent acheter du congelé en Espagne au double, voire au triple de son prix d'origine, au lieu de décider, une fois pour toutes, de s'engager dans le secteur de la pêche en Mauritanie, pour compenser le déficit chronique en protéine de poisson que l'Algérie accuse, à son corps défendant, depuis plus de trente ans. On nous a confié, hier, que la société mixte algéro-mauritanienne sera relancée au plus tôt et qu'à partir de là, dans les menus des restaurants algériens, on pourra enfin commander des tranches de mérou sans se brûler les doigts en réglant la note à la sortie. La pêche constituant un secteur d'activité pouvant aisément servir l'intérêt des deux pays, il ne reste plus que l'audace et la témérité pour transformer un vieux rêve en réalité. En un mot, il suffit de le vouloir. Figurant sur la liste des pays vivant en dessous du seuil de pau- vreté, selon l'ONU, la Mauritanie, loin s'en faut, suscite quand même des regards comportant humanisme et volonté de servir. Un humanisme en appelant un autre, celui des Algériens qui, à en croire des observateurs locaux, seraient les seuls dans la région qui n'ont jamais cherché à exploiter un pays dont la précarité leur aurait servi de prétexte pour exploiter certaines de ses richesses sans lui en donner le prix juste. La preuve en est que les Algériens, qui n'ont pas usé de ficelles à connotation spécifiquement mercantiliste, n'ont pas réussi à se frayer un chemin dans la course aux champs censés abriter du pétrole. Un Algérien, vivant à Nouakchott et qui a à faire dans les milieux pétroliers, nous a confié à propos de ces occasions perdues qu'entre les investisseurs et le gouvernement mauritanien, le chemin est occupé par des intermédiaires d'un genre particulier, des intermédiaires dont le fait de «toucher» du bakchich n'est considéré comme une atteinte ni à l'éthique ni à la déontologie, encore que la déontologie, c'est bien connu, ne se soit jamais sentie à l'aise dans les milieux pétroliers. Le même problème se pose apparemment à Naftec qui, avec plus de soutien de Sonatrach, pourrait gagner des parts de marché beaucoup plus importantes en Mauritanie, sans compter qu'elle pourrait également, toujours à partir de là, gagner d'autres marchés sur le continent africain. Toutes ces activités demandent pour leur développement, cela va sans dire, des moyens, certes, plus consistants, mais dont les procédures devraient être beaucoup plus souples et surtout inspirées de l'esprit même que suppose la concurrence à la réalisation d'objectifs économiques et commerciaux en dehors du monopole d'Etat. Cela étant dit, il n'y a vraiment pas lieu de croire qu'en Mauritanie, les activités économiques et commerciales ne s'exerceraient que conditionnées par l'argent, loin s'en faut. Parallèlement à cette odeur, tout à fait timide, de l'argent, il existe en Mauritanie des associations dont la plus importante a été créée par des médecins algériens et mauritaniens à l'époque où les relations entre Alger et Nouakchott étaient au beau fixe. Auprès une longue embellie qui lui a permis d'activer dans un certain nombre de secteurs comme l'enseignement dispensé par des professeurs en médecine algériens, à Nouakchott notamment, l'association en question connaîtra une longue période d'inactivité. Jusqu'en 1993, en fait, où des hommes de bonne volonté se sont engagés à lui redonner une chance en refondant une nouvelle association dont ils voudraient intégrer le devenir à l'ambition qui semble, cette fois, largement imprégnée de la volonté des deux pays de mener à bien la coopération entre ces deux nations.