Il aura suffi d'une semaine pour effacer les traces de l'une des plus vieilles civilisations du monde. En effet, en quelques jours seulement après la chute du régime de Saddam, les sept plus grands musées nationaux irakiens ont été pillés et la Bibliothèque nationale incendiée. Ces actes de vandalisme ont été présentés par la presse américaine, comme une conséquence logique de cette guerre. Les pillages ont eu lieu dans les villes. «libérées par la coalition». Plusieurs présidents et des associations universelles ont condamné ces actes. Le président Chirac a, de son côté, qualifié ces vols de «crime contre l'humanité». L'Unesco a aussi appelé à l'interdiction de commercialiser les oeuvres dérobées. Le musée de Mossoul fait partie de la liste des institutions culturelles pillées, son conservateur, M.Adif Mohamed, a indiqué «La présence des troupes américaines, lorsque le pillage a eu lieu. Malgré cela aucune action n'a été entamée pour protéger les sites», même scénario s'est déroulé au Musée national de Bagdad 80% des quelques 150.000 pièces ont été dérobées, selon l'ancien ministre de la Culture, Moayyed Saïd Al-Damergi. Des spécialistes américains reçus au Pentagone avant les bombardements ont sensibilisé les militaires a la probabilité des pillages des sites historiques. Bien que les mises en garde aient été adressées par des experts internationaux, rien n'a pu empêcher ces pillages. Un seul bâtiment officiel à Bagdad a été épargné par ces actes : le ministère du Pétrole bien protégé par les forces coalisées. Ce qui laisse croire que la convoitise des Américains s'arrête là. Par ailleurs, le directeur de recherches et d'études au Musée national irakien de Bagdad, M.Donny George, est convaincu du professionnalisme des pilleurs. Il affirme que «les pillages n'ont pas touché aux copies, ils ont pris les originaux, c'est un vol organisé.» Il était même question de complicité interne quant au pillage des oeuvres les plus précieuses pourtant placées dans des chambres fortes au début des bombardements. Cette non-intervention des forces coalisées accrédite la thèse d'un pillage organisé dans la plus pure tradition coloniale. En outre, dans une lettre adressée aux pays membres de la coalition, neuf archéologues ont appelé à la protection des sites culturels et à une vigilance internationale empêchant par là, la vente des objets volés. Ces archéologues n'ont pas caché leur inquiétude vis-à-vis des Etats-Unis, de vouloir profiter de sa tutelle sur l'Irak, pour favoriser le commerce illégal interdit depuis la fin du mandat britannique en 1924 et renforcé en 1975. Ils ont aussi incriminé un groupe créé en 1994, l'American Cuncil Cultural Policy (Accp) qui, selon le New York Times, avait négocié avec l'administration américaine dans le but d'exporter de l'Irak des objets de valeur. Le président de l'Accp a démenti toute accusation de faire modifier la législation irakienne sur les antiquités. Il a déclaré en revanche que «la dispersion du patrimoine culturel à travers le marché est l'un des meilleurs, moyens pour le protéger». Des efforts ont été fournis par l'ONU et l'Unesco, avec la collaboration du British Museum, pour envoyer de l'aide et préserver ces musées. Une consultation d'experts a été organisée à Paris. Au sortir de cette réunion McGuire Gibson, professeur à l'université de Chicago, a déclaré: «Les pillages ont été planifiés hors de l'Irak». Le directeur général de l'Unesco, Koïchiro Matsuura, a annoncé la création d'un fonds spécial pour le patrimoine culturel irakien. Il a appelé à un embargo international sur les objets d'art irakiens. Pour éviter qu'un scandale ne rejaillisse sur la Maison-Blanche, le conseiller aux affaires culturelles de Bush a remis sa démission, cela laisse penser à «l'implication» directe des Etats-Unis dans ces pillages.