Il y a quelques jours, la découverte d'une dizaine de touristes européens avait fait naître un début d'espoir. Alors que l'énigme de la disparition de 31 touristes européens bouclait allègrement son deuxième mois, les forces de sécurité algériennes découvrent une dizaine de randonneurs dormant à la belle étoile dans la périphérie d'Illizi. Cette «découverte» avait donné lieu à un véritable engouement auprès de l'état-major de l'armée et de la gendarmerie, engagé avec des milliers d'hommes dans les opérations de recherche depuis plusieurs semaines. Vérification faite, il s'agissait d'un autre groupe, non porté disparu, et qui passait sa dernière nuit en Algérie avant de regagner la Tunisie via Djanet. Hormis cette «trouvaille», somme toute inattendue, rien n'est venu percer le mystère des 31 touristes portés disparus depuis le 21 février, et dont les responsables des opérations de recherche commencent à désespérer surtout du côté algérien qui subit de fortes pressions, et qui a déployé une énergie exceptionnelle pour retrouver ces touristes, et clore un dossier qui commence à devenir encombrant. Aujourd'hui, au centre des intérêts, se trouvent les tribus nomades des zones frontalières algéro-maliennes, algéro-nigériennes et algéro-libyennes. A la lisière de ces pays, vivent des tribus nomades, turbulentes et sans cesse agitées par des crises sociales et politiques qu'elles transposent d'un pays à l'autre. Est-il possible que ces tribus, dont les hommes parcourent chaque jour les moindres recoins du vaste espace saharien, ne savent rien des 31 touristes disparus? Le doute est d'autant plus permis que le lourd silence qui s'abat sur le sort des touristes est presque intenable pour l'opinion des pays dont les ressortissants figurent parmi les disparus. Mais de quel côté orienter les recherches? Les services de sécurité algériens n'ont que le périmètre compris dans le territoire national pour effectuer leurs investigations. Au-delà, les tribus nomades, targuies ou autres, (il existe une vingtaine d'ethnies réparties sur le pourtour des frontières algériennes), étendent leur hégémonie, et même les services de sécurité locaux (maliens, libyens, nigériens, etc) ne peuvent venir à bout de ce système de cloisonnement que se sont imposé les tribus depuis longtemps. «Si aujourd'hui, les touristes sont encore en vie, c'est qu'ils doivent être quelque part chez des tribus dans l'une ou l'autre des frontières qui abritent les turbulentes tribus nomades du Sahel», tel est le constat d'un responsable des services de sécurité, qui ajoute : «Je vois mal comment on peut dissimuler des dizaines de touristes costauds et en bonne santé dans le désert, si ce n'est avec l'aide de tribus locales.» Jusqu'à quel point peut-on accorder foi à cette constatation? Nul ne peut le dire. En tout cas, c'est la plus rationnelle des explications, car il est pratiquement impensable que ces touristes puissent encore être en vie après deux mois dans le désert, tout comme il est impensable qu'ils soient morts dans le désert et que leurs corps n'aient pas été retrouvés, ni leur matériel et encore moins leurs véhicules et leurs motos. En l'absence de tout élément concret permettant d'élucider cette énigme, il y a au moins la nécessité de voir clair dans un univers de plus en plus opaque.