Une tempête dans un verre d´eau? Un non-événement? Ce n´est pas aussi sûr ! Qu´on le veuille ou non, le congrès de l´Organisation nationale des moudjahidine ne sera pas passé inaperçu. Commencé avec la polémique sur les 10.000 faux moudjahidine, continué avec la «fin de la légitimité historique», ces assises s´achèveront avec le retrait des travaux, à 22h 30, (retenez la précision) des cadres de la Fédération de France du FLN. Avouez qu´il y a de quoi faire des vagues. En réalité, les démêlés entre l´ONM et la Fédération de France, que certains historiques avaient élevée au rang de 7e wilaya, ne datent pas d´aujourd´hui. Ils remontent plus exactement à huit ans, si l´on en croit maître Ali Haroun. Il se trouve tout simplement que les cadres de cette fédération ont presque toujours joué le rôle de trublions au sein de l´organisation des moudjahidine, sans doute à cause de la qualité plus «intellectuelle» ou plus «élitiste» de ses éléments. Entre 1954 et 1962, la révolution avait besoin de tous ses enfants, mais à l´heure du partage du gâteau, d´autres critères apparaissent. Au demeurant, maître Ali Haroun n´hésite pas à parler de chauvinisme. Aussi, l´ancien membre du Haut Comité d´Etat (HCE) s´inscrit-il en faux contre un «surcroît» de privilèges ainsi que contre la résolution appelant «à fermer les frontières» aux pieds-noirs et aux harkis. Chauvinisme donc! Le retrait de Omar Boudaoud, responsable du comité fédéral et ancien membre du Cnra, de Mohand Akli Benyounès, de Mohamed Seghir Miri, ou de Abdelkader Bakhouche, pour protester contre le rejet de la liste de la fédération au conseil national, est-il le signe du malaise profond qui ronge les rangs de l´ONM? Les tractations de coulisses et les manoeuvres de marginalisation autour de la représentativité de la Fédération de France au sein des instances de l´ONM auront marqué l´essentiel des débats, alors même que cette question était censée être tranchée à la suite des promesses faites par Cherif Daâs, secrétaire général par intérim de l´organisation et Mohamed Cherif Abbas, ministre des Moudjahidine. Si les problèmes resurgissent dans les coulisses et font l´effet d´une douche froide, c´est que les promesses n´engagent que ceux qui les font. Ces crêpages de chignon ont malheureusement fait passer au second plan ce qui devait être la substantifique moelle de ces assises. D´un côté, ce que peut donner la «patrie reconnaissante» à ceux qui ont libéré le pays, et c´est normal. Les distinctions remises aux historiques comme Mohamed Khider, Krim Belkacem, Rabah Bitat, Didouche Mourad, Larbi Ben M´hidi ou Hocine Aït Ahmed ont fait croire un instant, que les oublis et la falsification de l´histoire, c´était du passé. De l´autre on voulait aussi savoir ce que pouvaient donner ces mêmes qui ont libéré la patrie aux générations montantes: l´écriture de l´histoire, la mémoire de tout un peuple, mais surtout ce qui n´a pas de prix: quel est le message de Novembre? Le renouvellement de ce message, on ne le répétera jamais assez. Il n´y a pas de meilleur moment et de meilleure tribune pour le renouveler qu´ un congrès des moudjahidine. Cependant, le faux, le toc, le clinquant, joué sur le thème des faux moudjahidine, a déteint sur un congrès qui était fait pour rassembler, et qui se retrouve à diviser, à marginaliser, à bannir, dans les rangs d´une catégorie de citoyens qui fatalement seront de moins en moins nombreux, du fait de l´âge et de l´usure du temps, du fait aussi de ceux qui ont fait du rêve de tout un peuple une simple partition jouée sur le mode de l´opérette, avec masques et bergamasques.