Faut-il vraiment que l´adhésion de la Turquie à la communauté européenne soit vraiment très importante pour que, épisodiquement, les chaînes de télévision braquent leurs spots sur les déclarations des chefs de gouvernement, d´hommes politiques, d´analystes ou de penseurs... De toutes les chaînes, c´est vraiment Arte qui bat les records d´intérêt pour la patrie de Mustapha Kemal. Pourquoi? Tout simplement parce que Arte a un pied en France et l´autre en Allemagne! Au moment où les nations européenne, colonisaient le monde l´Allemagne n´avait pas encore fait son unité. Et quand elle l´a faite, c´était trop tard! L´Allemagne se trouvait dans l´obligation de commercer avec des pays qui étaient eux-mêmes en butte avec le colonialisme européen. L´Empire ottoman dans le déclin et l´Iran ne trouvèrent pas mieux que de resserrer leurs liens avec Berlin. La Turquie se rangea même du côté des forces de l´Axe pendant le premier conflit mondial. Mal lui en prit puisqu´elle y laissa des plumes. Mais elle y gagna une jeune révolution militariste qui redonna une certaine dignité à ses enfants. Elle fit mieux, ou pire, c´est selon l´angle de point de vue: elle se mit au service de l´impérialisme américain pour contenir sur le flanc sud le géant russe. Son territoire devint un vaste porte-avions pour les forces de l´Otan qui l´utilisèrent dans toutes les opérations d´intervention qu´elles engagèrent au Moyen-Orient, surtout pour soutenir Israël, si bien que les USA sacrifièrent la démocratie grecque au profit de la soldatesque turque. Car depuis 1923, le régime turc fut dirigé par et pour les militaires. «Tous les pays ont une armée, la nôtre seule possède un pays», disent les Turcs. L´armée fut le garant de l´unité et de la laïcité du régime fondé par Attaturk. Et depuis quarante ans, la Turquie ne cesse de frapper à la porte de la CEE. Depuis quarante ans, les pays européens font la sourde oreille à ce pays qui possède une démographie importante et une main-d´oeuvre bon marché qui va se déverser sur le marché européen, mettant en péril le niveau de vie des travailleurs européens qui souffrent déjà des délocalisations. Tous les arguments sont bons pour retarder l´adhésion de la Turquie: la non-reconnaissance du génocide arménien, la montée de l´islamisme, le non-respect des droits de l´homme, le faible revenu moyen du Turc... Heureusement que les débats organisés donnent un peu de lumière sur les projets européens. Bronislaw Geremek, analyste et ancien ministre polonais, l´a bien expliqué: l´Europe, pour sa politique future, doit avoir un avant-poste imposant face à ses futurs protagonistes. Sans nommer la Russie, on a bien compris que la Turquie, qui soutient divers mouvements indépendantistes caucasiens, aura toujours un rôle à jouer face à l´ex-URSS.