Encore une occasion pour le citoyen algérien pour vouer aux gémonies les décideurs, le FMI et toutes les courroies de transmission entre ces deux systèmes qui portent tous les jours, depuis 1991, des coups sérieux à son pouvoir d´achat qui fond comme beurre (pas la margarine végétale !) au soleil, devant la montée inexorable des prix : le pouvoir réputé comme le plus conservateur du monde, vient de faire un cadeau royal (et c´est le cas de le dire) à ses bienfaiteurs citoyens! Eh oui! Le roi Abdellah d´Arabie Saoudite (à ne pas confondre avec son rival malheureux de Jordanie, à qui les Anglais n´ont donné qu´un périmètre restreint de sol stérile à gouverner et, avec en prime, un voisin doté d´un arsenal nucléaire impressionnant et des réfugiés palestiniens remuants), vient de décider de baisser de 30 pour cent les prix de l´essence à la pompe, ceci pour faire bénéficier ses fidèles sujets de l´augmentation du prix du baril. Car dans ce périmètre saint, la manne pétrolière, loin d´être considérée comme ici, comme une malédiction, est reçue comme un bienfait du ciel, un don d´Allah Qui voudrait que les descendants des compagnons du Prophète soient récompensés... Et tout cela un premier mai! Voilà qui va donner une coloration nouvelle à cette journée qui fut longtemps considérée comme la Fête des travailleurs! Le pauvre travailleur algérien, lui, a beau faire un flash-back pour consoler sa pauvre âme ravagée comme sa bourse par un budget calculé sur un baril à 19 dollars, il ne peut retrouver le moral, lui qui se sent solidaire de tous les travailleurs qui ont fait de la fête du muguet un repère dans la longue lutte des conquêtes sociales. Comme toutes les bonnes traditions, le 1er mai nous vient de Chicago, cette ville ouvrière, qui, lors d´une manifestation où des policiers trouvèrent la mort, vit une répression féroce s´abattre sur les syndicalistes dont quatre furent pendus. Depuis ces événements tragiques, l´Europe a pris le relais en organisant des affrontements violents entre ouvriers syndicalisés et policiers au service du Capital. Les grandes conquêtes sociales, qui virent leur réalisation en 1936 en France, congés payés, journée de huit heures, reprirent de plus belle après la Seconde Guerre mondiale avec comme contre-point les mouvements de Libération nationale. L´Algérie, au lendemain de 1962, fit du 1er mai une journée de grande fête nationale avec des défilés importants, de chars fleuris, de slogans révolutionnaires et de cérémonies importantes comme les distributions de bénéfices fictifs dans des entreprises soumises à un traitement sous sérum. Le 1er mai 1966 vit deux éminents artistes algériens, Kateb Yacine et Mohamed Issiakhem qui défilèrent en criant des slogans pour un syndicat libre, se faire interpeller. Depuis, le syndicat unique devint un des leviers de transmission du pouvoir. Boumediène organisa de grandes messes, allant même jusqu´à inviter à ses côtés le vieux père d´Aïssat Idir. Depuis la tragédie internationale qui vit l´arrivée de la flexibilité et de la précarité dans le monde du travail,le 1er mai déserta le monde du polygone étoilé pour se réfugier au sud des grandes hamadas. L´année dernière, Sidi Saïd le célébra à Tamanrasset, cette année, c´est Ouargla, chef-lieu d´arrondissement de Hassi Messaoud qui résonnera des envolées lyriques du gardien de but de l´Ugta. C´est un peu un hommage au prix du baril, rendu par un syndicat sur le déclin. A quand un congrès à Tablat? Quand le prix de l´oignon atteindra 100 DA certainement ou à Mascara, quand c´est la patate qui incendiera les mercuriales.