De la passion de la danse naît une philosophie de la vie que tend à appliquer le chorégraphe François Veyrunes. «Avec la danse, je souhaite toucher la part d'enfant qui reste en chaque spectateur, sa part de sensibilité pure», affirme François Veyrunes qui dirige depuis 1989 une compagnie de danse contemporaine baptisée 47.49, clin d'oeil à l'adresse d'un ami sculpteur à New York où il est parti un jour se perfectionner en danse. En effet, après avoir été champion de ski puis informaticien, il décide de tout lâcher, ne plus consacrer sa vie à la gymnastique intellectuelle, mais à la gymnastique tout court. «L'amour de la danse, ma nouvelle passion», nous confiera-t-il lors d'un point de presse. Libéré du carcan du monde cartésien, il fait désormais, confiance au corps pour dit-il «libérer du sens». François Veyrunes donne à voir le monde à travers le mouvement et le geste sans tendre forcément à l'expression absolue. La dramaturgie, la danse, la scénographie, la lumière, le son, les costumes, le tout combiné fait naître des personnages imaginaires que le spectateur croit reconnaître car extirpés de son quotidien le plus banal. A travers la danse, François Veyrunes aime raconter des histoires. Ses chorégraphies sont généreusement évocatrices. Raconter suppose un répondant, une écoute, une compréhension, un échange d'où son désir d'entreprendre avec le publi ravail de sensibilisation autour de la culture chorégraphique. Pour ce faire, il crée des ateliers de travail chorégraphique destinés à un large public, tous âges confondus (profanes et professionnels de la danse), «sans pour autant tirer le niveau de l'apprentissage vers le bas», précise t-il. Ce qui importe pour lui est d'inviter les gens à voir et à saisir les différentes étapes de la création d'une pièce chorégraphique «apporter un plus au spectacle, le faire vivre de l'intérieur». C'est l'acte citoyen que peut apporter un artiste d'après lui. Vivre pour servir cet art, la danse est sa raison d'être. Son but: susciter l'envie, l'appétit d'en faire autant, peut-être mais surtout donner du plaisir et du rêve aux gens. Une mission que François Veyrunes et ses danseurs se sont magnifiquement acquittés les 1er, 2 et 3 mai derniers en animant des masters class à la salle Ibn-Khaldoun au profit des élèves et professeurs de danse et du théâtre d'Alger notamment, le ballet d'Arts et culture. «On essaye de recevoir, pas seulement de donner», confie le chorégraphe. Pour lui, la danse est un langage universel qui s'exprime par le corps et peut incarner un sentiment. Contrairement à la danse classique qui répond à des normes réfléchies et préétablies la danse contemporaine appelle l'intelligence du corps à interpréter le monde et les hommes qui le composent. Une philosophie qu'il tend à appliquer au cours de ses travaux lors de ses innombrables rencontres. «Le spectacle doit, avant tout, provoquer une émotion», renchérit-t-il. Foi d'artiste, un vrai qui se place au-dessus des préoccupations mercantiles. Déjà, avoue-t-il, «le métier de danseur est souvent le moins ou le plus mal payé». Il faut avoir donc de la ténacité et un amour démesuré pour la danse pour continuer dans cette voie. Aujourd'hui, François Veyrunes capitalise plus d'une quinzaine de pièces chorégraphiques dont Frictions qu'il a présenté le 6 et 7 mai dernier à la salle Ibn-Khaldoun. Cette pièce met en scène, ajoute ce passionné d'art, «le regard d'un enfant sur le chaos, la complexité du monde des adultes. le but c'est de développer une certaine poésie de la vie quotidienne» En effet le public est plongé dans des univers plus ou moins familiers: basse-cour, caserne militaire, supermarché, travail ménager, milieu des affaires...Sur une musique originale signée henry torgue, le spectateur est transporté vers un monde fantasmagorique où le fantastique cède le pas au réel. Les danseurs incarnent des personnages à la limite du burlesque. Exemple: des poules, le renne du père noël cela plaît aux enfants en tout cas. Pour le reste,on trouve ça bizarre. Le spectacle suscite des questionnements. «A travers lui, nous dit cette danseuse, le chorégraphe se demande en fait pourquoi nous ne faisons que courir tels des robots. La valise représente l'attaché-case des hommes d'affaires.» Pour rappel, le spectacle s'inscrit dans le cadre du mois culturel européen suite à une convention entre l'AFAA (Association française d'action culturelle) et Grenoble, ville d'où provient cette compagnie de danse. Elle se produira le 10 mai prochain au TR d'Oran.