Dans tous les pays du monde, l´hymne national est, après le drapeau, la chose la plus sacrée. Ce chant, qui unit tous les patriotes, est protégé avec sévérité par un article de la Constitution. Il est un symbole national et son histoire se confond toujours avec un pan de l´histoire du pays. Porter atteinte à l´intégrité de ce symbole revient à amputer la loi fondamentale. C´est sans doute pour réparer la bévue ou la maladresse de certains auteurs de livres scolaires que le ministère de l´Education nationale a décidé de donner un cours modèle sur l´hymne national dans tous les établissements scolaires. Voilà une initiative louable qui rappelle celle qui a été prise en septembre 1962, lors de la première rentrée scolaire de l´Algérie indépendante, où des professeurs et des instituteurs ont écrit sur le tableau noir, après un exposé tout à fait succinct retraçant la courte histoire des deux symboles de la nation: le drapeau et l´hymne. S´en est suivie après une explication du texte de Moufdi Zakaria. Il faut rappeler que tout cela a été fait après un été très chaud dans certaines régions et les tristes événements n´avaient pas altéré le patriotisme des uns et des autres. Tous les espoirs étaient permis, mais les bonnes habitudes ont été perdues. Pendant des décennies, l´école a tourné le dos au drapeau et à l´hymne national. Plus grave, l´école fondamentale a importé des valeurs qui ont remisé les symboles sacrés dans les greniers au point que certains militants du parti dissous, non seulement faisaient payer à leurs élèves les photocopies des tracts subversifs de ce parti, mais encore ont inculqué aux enfants innocents des valeurs et des pratiques étrangères aux rites en cours dans le pays. Ainsi, pendant longtemps, l´école dans sa quête de la reconquête de l´identité nationale a formé des militants mais non des patriotes. Et un patriote, ce n´est pas seulement quelqu´un qui respecte, aime et défend les symboles de la nation, mais c´est surtout quelqu´un imprégné de civisme: quelqu´un qui respecte, applique et fait appliquer les lois, les us et coutumes du pays. Comment alors faire aimer ces valeurs à un enfant, qui, au sortir de l´école, est confronté à une réalité toute opposée à celle qu´on lui avait décrite. Il s´apercevra très vite que les leçons apprises ne lui serviront pas à grand-chose quand le piston est l´élément qui règle et dirige la société. Il déchantera (et c´est le cas de le dire en parlant d´hymne national) quand il prendra conscience du nombre et du rythme des détournements dont a souffert et souffre le secteur public. Il perdra toute illusion quand il lira sur les «unes» le nombre de harragas qui ont préféré la noyade à l´étouffement local. Il aura perdu toutes ses illusions quand il connaîtra l´histoire profonde de sa patrie bien-aimée et la corruption qui l´étouffe. Enfin, il se fera une idée définitive quand on lui dira que tel édile, inculte et analphabète, a terminé sa carrière avec une galette bien rondelette.