Tous les facteurs sont réunis pour faire de la rentrée une saison chaude. Les nombreux conflits se sont cristallisés, durant une longue période d´incubation où le pouvoir en général, et l´Exécutif en particulier, semblaient pratiquer la politique de l´autruche ou celle de Tartuffe qui préférait voir ailleurs plutôt que les sujets qui fâchent. D´abord, il faut convenir que la saison n´a pas cessé d´être chaude puisqu´une série d´attentats ont, en trois mois, endeuillé des centaines de familles et donné du grain à moudre à une presse en mal d´inspiration. Ce terrorisme, qui renaît de ses cendres, chaque fois qu´un haut responsable en annonce le dernier quart d´heure, n´est pas hélas, le seul sujet de préoccupation des Algériens condamnés à vivre éternellement, une crise pluridimensionnelle. Il y a, d´abord, ce pouvoir d´achat qui s´étiole et périclite à vue d´oeil. Et le comble c´est qu´il n´y a pas de remède à cela. Enfin, il semble. D´abord, il y a une vérité qu´on ne cesse de nous asséner depuis quelques années au sujet des salaires: l´Algérien ne produisant pas de richesses, toute augmentation de salaire serait une hérésie. Cela sort, tel quel, de la bouche des spécialistes en économie que relaient les ténors de l´Exécutif. Ce qui semble contradictoire, c´est qu´à côté, c´est-à-dire dans les chapitres consacrés aux dépenses de prestige qui ne procurent aucune valeur ajoutée, le gaspillage est effarant et il n´est nul besoin, ici, d´en faire la liste assez longue, pour argumenter. Ces dépenses qui consistent à jeter de l´argent par les fenêtres et au ciel et qui atterrissent le plus souvent dans les poches des entrepreneurs, des artistes de passage et autres rentiers patentés, n´ont nul besoin d´une tripartite pour être planifiées, mesurées, pesées, homologuées: elles sont expédiées franco de port. Et quand le pauvre quidam, celui qui sue pour avoir un salaire (quand il a la chance d´avoir un revenu qui ressemble à un salaire - mais de loin), se pose la question de savoir comment il doit faire pour boucler cette fin de mois qui est toujours loin, il y a toujours un ministre bien placé pour lui expliquer, chiffres et courbes à l´appui, que c´est la faute aux consommateurs qui ont les yeux plus gros que le ventre et qui ont la fâcheuse habitude de stocker à la veille de chaque Ramadhan. Il oublie de dire, ce cher ministre, que tous les mécanismes de régulation ont été supprimés par les précédents gouvernements et les contrôles de prix ne semblent avoir aucun effet sérieux sur la spéculation effrénée qui touche certains produits. La preuve, c´est que le gouvernement revient à la bonne et vieille recette qui a fait le petit bonheur des masses populaires qui ont vécu sous le régime du socialisme spécifique: le soutien des prix. Il ne reste plus au gouvernement qu´à adjoindre une politique de soutien des salaires avec un mécanisme qui irait l´amble avec la montée des prix. Il n´est plus besoin de convoquer une tripartite à grand renfort de pub et qui, après des séances d´imprécation, finira par sortir une fetwa mouillée qui fera l´effet d´un cautère sur une jambe de bois. Par contre, ceux qui prétendent que les tensions actuelles ne sont dues qu´à la faveur d´un climat préélectoral, sont dans la même position que ceux qui accusent les météorologues d´être les auteurs du mauvais temps. La preuve, c´est que le ministère de l´Education a, après 35 jours de grève de la faim des enseignants contractuels, promis de désamorcer la crise en soumettant à ces malheureux un nouveau contrat, provisoirement. On arrive ainsi vite à la conclusion que la nature des maux qui perdurent depuis presque deux décennies, à savoir l´émigration clandestine et le terrorisme, sont intimement liés à la nature du régime et à la façon de gouverner. Comme le coquelicot l´est au blé.