Les autorités algériennes refusent toute aide extérieure dans cette affaire et n'excluent aucune piste. La liste des touristes européens disparus dans le Sud algérien s'allonge par le rajout d'un 16e disparu allemand, portant le nombre à 32 et une hypothèse, susurrée depuis le début du feuilleton dans les milieux intéressés par cette affaire, celle d'un enlèvement opéré par des éléments apparentés au mouvement touareg malien fait son petit bonhomme de chemin. Dimanche dernier, l'ancien président malien Alpha Oumar Konaré a séjourné à Alger où il a été reçu par le Président Abdelaziz Bouteflika. Officiellement, c'était une visite de courtoisie. Au-delà, l'ex-président malien, qui a dirigé son pays de 1992 à 2002, briguerait le poste de président de la commission de l'Union africaine (UA), le bras exécutif de l'organisation panafricaine, selon les observateurs. Mais certaines indiscrétions n'excluent pas le fait qu'il ait été question, entre les deux hommes, des touristes disparus. Plusieurs indices tendraient à accréditer cette thèse. Ce que «confirmera» l'audience accordée hier par le Président Abdelaziz Bouteflika à l'ambassadeur malien à Alger, M.Cheick Sidi Diarra qui lui a rendu une visite d'adieu au terme de sa mission de neuf ans en Algérie. Le Mali, qui partage une frontière de 2000 km avec l'Algérie dans le Sahara, y a déjà déployé des centaines de militaires pour participer à la recherche des 32 touristes disparus. Du côté algérien, 5000 militaires appuyés par des hélicoptères et des centaines de guides sahariens ratissent toujours la région où ils ont disparu. Par ailleurs, des membres des services de sécurité algériens (DRS) se trouvent au Mali depuis samedi dernier à la recherche de Mokhtar Belmokhtar, un chef du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc) affilié à l'organisation terroriste Al-Qaîda d'Oussama Ben Laden. L'hypothèse de l'enlèvement des touristes par des éléments dirigés par Belmokhtar n'a pas été exclue par les autorités au même titre d'ailleurs que toutes les autres, et ce, dès le début des disparitions des touristes, intervenues entre la mi-février et la mi-mars. Des indiscrétions récentes dans la communauté targuie algérienne, battent en brèche la thèse de l'enlèvement des touristes par les groupes islamistes armés. Idem pour la piste libyenne et tunisienne. Les regards sont braqués d'ores et déjà vers des résidus du mouvement rebelle de l'Azawad, actifs dans la région se situant à cheval entre les frontières algérienne et malienne. Une source targuie ayant requis l'anonymat n'a pas hésité à circonscrire la présence des touristes dans le nord du Mali. Même si on se refuse jusqu'à présent à parler officiellement de kidnapping, l'instabilité qui caractérise ce vaste territoire où pullulent des contrebandiers en tous genres et dans lequel les touristes sont susceptibles de se trouver, laisse à penser qu'il y aurait au moins collusion d'intérêts entre le groupe de Belmokhtar et les irrédentistes touareg maliens, réfractaires à l'accord de paix signé en 1992. En avril 1992, un pacte de paix a été signé entre le gouvernement malien de transition présidé par le lieutenant-colonel Amadou Toumani Touré et les représentants des Mouvements et fronts unifiés de l'Azawad (Mfua). Il succédait à un précédent accord conclu un an auparavant en Algérie, à Tamanrasset, par le régime du général Moussa Traoré. Le pacte ambitionnait de répondre à l'une des revendications majeures des Mfua: un statut particulier pour les trois régions du Nord, appelées Azawad. Des négociations furent menées avec la médiation de l'Algérie. La France n'interviendra pas officiellement, mais son projet de décentralisation aurait servi de cadre au document final. Selon le pacte, un nouveau découpage administratif du nord du Mali, fondé sur des assemblées locales, régionales et interrégionales, devait intervenir. Les écueils ayant marqué l'application de ce plan sont des raisons suffisantes pour attiser le feu des rebelles dans un no man's land objet de toutes les convoitises. Enfin, après le ministre allemand des Affaires étrangères Joschka Fischer qui a exprimé lundi dernier à Alger son «entière confiance» en Algérie, un émissaire suisse, de retour d'Alger, a indiqué, le même jour à Berne, que les autorités algériennes l'avaient assuré ne pas être en négociations «avec quelque partie que ce soit». Hier matin encore, le ministre des Affaires étrangères, M.Abdelaziz Belkhadem, a reçu M.Yrle Johannes, secrétaire général du ministère des Affaires étrangères d'Autriche qui effectue une visite de travail de deux jours en Algérie. Enfin, de Tunis où il se trouvait hier, le ministre allemand des Affaires étrangères, Joschka Fischer, a parlé d'«otages». Il s'est refusé à donner plus de détails sur le sort des disparus, ajoutant: «Nous espérons que toutes les personnes disparues pourront rentrer saines et sauves dans leur famille et nous comptons beaucoup sur l'aide et le soutien de nos amis algériens». L'usage du terme «otage» par le chef de la diplomatie allemande pourrait étayer la thèse de l'enlèvement par des activistes islamistes ou des contrebandiers.