Quand une équipe de football fait une nation et que la FIFA compte plus de membres que l'ONU, à quoi pourrait servir l'ONU ? Question abrupte? Sans doute. Mais n'a-t-elle pas le mérite de faire réfléchir à un avenir déjà esquissé par «des linéaments d'une culture mondialisée»? II n'y a qu'à observer, d'une part la composition des équipes nationales lors des toutes dernières Coupes du monde, et d'autre part, combien «les inégalités politico-économiques semblent pouvoir y être contrebalancées par des facteurs culturels». On peut très bien noter l'exemple, jusque-là très significatif, du Brésil qui, grâce à sa grande tradition du football, surclasse, dans cette caractéristique précise de la culture sportive mondiale, les Etats-Unis «qui sont en délicatesse avec le ballon rond». Le petit ouvrage intitulé La mondialisation de la culture (*) de Jean-Pierre Warnier (Collection Approches, animée par Mustapha Madi) vient poser une grande question d'actualité assortie de sous-questions et proposer des voies pour comprendre ce phénomène qui ne cesse de se développer et de s'insérer dans les grandes activités sociales mondiales. Notre auteur, qui est professeur d'ethnologie et d'anthropologie à l'université Paris-V-René-Descartes, veut d'abord préciser le concept sur lequel porte son travail. «Parler de mondialisation de la culture, écrit-il, est un abus de langage. Cette expression, bien commode au demeurant, devrait être bannie de tout discours rigoureux. Cet objet se dissout dans l'analyse. Tout au plus peut-on parler de la globalisation de certains marchés des biens dits «culturels» (cinéma, audiovisuel, disque, presse, en particulier les magazines). Confondre les industries de la culture et la culture, c'est prendre la partie pour le tout. C'est privilégier la vessie médiatique des pays industrialisés pour la lanterne de tout ce qui n'est pas assez spectaculaire pour émerger dans la zone de captage des médias, et qui lait la substance des cultures du monde. C'est mettre mentalement hors jeu les neuf dixièmes de l'humanité, dont la vie, de la naissance à la mort, a d'autres références que ce qui gravite autour de l'écran cathodique.»