Dans cette triste histoire de luttes incessantes autour d´un lot de terrain à Bordj El Kiffan, seuls les deux avocats du jour ont été à la hauteur...Hum, hum! «Nous défendons notre honneur et notre lot de terrain qui sera défendu par tous les moyens prévus par la loi et la loi seulement.» C´est l´avocat qui s´exprime ainsi, c´est bon. Lorsqu´il y a un litige autour d´un lot à bâtir, la justice est interpellée. Ce procès est un grave prolongement de poursuites engagées auprès du juge des référés et celui du civil. Une rixe générale a mis aux prises deux équipes dans le sens le plus «bagarreur» du terme. Il y a le propriétaire du lot à bâtir, son chauffeur d´engins et un neveu. En face, il y a l´adversaire dont la maman court après le lot à bâtir tant convoité. Les deux défenseurs sont,certes, opposés à la barre, mais demeurent de grands amis. Du spectacle en prévision... C´est Nadia Bouhamidi, la présidente, qui est appelée à statuer sur cette affaire. Une sinécure. L´interrogatoire a été si tortueux que la juge a dû prévenir qu´elle a suivi ce dossier depuis le début. Aux coups et blessures volontaires, il y a destruction de biens d´autrui, voire menaces à arme à feu. Cette pertinente mise au point de la magistrate a mis de l´eau dans le.... vin des parties en présence. Maître Abdelkrim Bouderbal, impérial, était face au talentueux Maître Benouadah Lamouri qui ne vient jamais dans une salle d´audience en... touriste! Nous nous ferons l´économie du compte-rendu des versions données par Abderrazak A., Mohamed et Sid Ali K., les frères à la barre, Fethi C., Houcine K. et Mostefa B. Il faudrait seulement imaginer l´exagération donnée à la barre lorsqu´il s´est agi d´évoquer les coups et blessures. Les certificats médicaux délivrés n´étaient pas en conformité avec les pseudo-coups donnés ou reçus. Même la menace à arme à feu n´en était pas une: «Une seule fois, il m´a menacé de dégainer, mais je n´ai pas vu l´arme à la main», reconnaît Belgacem H., en parlant des coups donnés par Fethi C. Voilà donc un exemple type, histoire de ne pas frustrer le lecteur. Rixe, insultes, injures, basses répliques, mots orduriers de bas étage, tapage, cris, hurlements, une véritable guerre. Et c´est le tribunal, par la bouche de son président, qui est chargé de faire le ménage. Comme quoi... Il est vrai que Maître Bouderbal et Maître Lamouri se sont longtemps escrimés à la barre, mettant au défi les parties en présence d´étaler les preuves: «Cette histoire de destruction de bien d´autrui est un vulgaire montage», lance Maître Benouadah, qui n´est pas surpris de la réplique de Maître Abdelkrim Bouderbal, lequel avait estimé que «les certificaux médicaux délivrés n´émanaient pas du légiste». Mousrati Faïza, la vigilante procureure, a insisté sur le bien- fondé de l´inculpation. «A les entendre, ils sont victimes», a-t-elle balancé avant d´attirer l´attention du tribunal sur la présence, dans le dossier, de photos prouvant la destruction de biens d´autrui (engins) et de coups et blessures (certificats médicaux de sept, huit, voire dix jours d´incapacité). Elle demande des peines de prison ferme de deux mois, six mois et un an ferme, outre des amendes ferme, à l´encontre de ces inculpés de coups et blessures volontaires réciproques. Maîtres Lamouri et Maître Bouderbal, les deux défenseurs ont axé leurs interrogations sur le fait de l´existence d´une procédure en section «civile» pour le fameux litige autour du lot à bâtir, que l´agression a eu lieu sur les terres des victimes qui n´ont pas pu supporter les incessants va-et-vient des étrangers au terrain, qu´ils avaient déjà déposé plainte jusqu´au niveau du parquet d´El Harrach. «Tout a été fait pour faire fuir nos clients du lot à bâtir», a soufflé le second avocat que le confrère, Maître Lamouri, salue de la tête et des épaules. Après un court délibéré, Nadia Bouhamidi condamne les inculpés calmés, à une amende, les premiers, et les seconds, au sursis, six mois de prison. Alors que tout ce beau monde se disperse dans les brunes de novembre d´El Harrach, incorrigible cité où l´humidité s´y trouve bien, les deux avocats, eux, sont allés s´asseoir et rigoler un bon coup, histoire de se prouver, encore une fois, que le justiciable passe, la confraternité reste. Et comment, Maîtres!