«C´est marrant, suffit de s´arranger pour que quelqu´un pige rien à ce qu´on lui dit et on obtient pratiquement tout ce qu´on veut.» J. D. Salinger S´il y a une télévision qui a joué un rôle déterminant dans la révolution du Jasmin en Tunisie c´est bien Al Jazeera. Depuis le début de la contestation, la chaîne qatarie, n´a pas cessé de diffuser les vidéos amateurs des manifestants tunisiens de Sidi Bouzid. Durant au moins un mois, la télévision arabe a ouvert son micro et son antenne à tous les bords de l´opposition tunisienne alors qu´elle n´avait aucun bureau ou correspondant à Tunis. Grâce à l´implication de certains journalistes tunisiens travaillant à Al Jazeera, dont les plus influents sont les vedettes de l´information, les présentateurs de JT Mohamed Krichene et Leïla Chaïeb, Al Jazeera a pu obtenir des contacts avec la majorité des opposants tunisiens qui étaient terrés en Tunisie ou cachés à l´étranger et qui communiquaient rarement avec les médias étrangers de peur d´être embarqués par la police ou expulsés. Ces deux journalistes qui dirigeaient des émissions spéciales depuis le début des événements, n´avaient pas de parti pris personnel sur la ligne éditoriale de la chaîne, en raison de leur origine, ils appliquaient seulement les consignes de liberté d´expression dictées par le premier responsable d´Al Jazeera Cheikh Hamad bin Khalifa Al Thani car le Qatar avait déjà choisi son camp celui de la liberté et la démocratie en Tunisie. Toutes les tentatives de faire taire Al Jazeera sont restées vaines à Tunis, ce qui a conduit le président Ben Ali, à autoriser le 5 janvier, l´organisation d´un débat politique sur Nessma TV sur la situation à Sidi Bouzid, dont le but exclusif était de répondre à la couverture d´Al Jazeera, selon la révélation de la journaliste de la télévision des frères Karoui. Al Jazeera a suivi, minute par minute, les événements en Tunisie à travers son canal Al Jazeera Mobasher, et à travers le réseautage des sciences politiques, elle a donné la parole à tous les conseillers et experts en politique internationale. Après la chute de Ben Ali, les langues se sont déliées sur les autres télévisions tunisiennes comme Nessma TV qui, contrairement à Hannibal TV et TVT, avait opté pour un plateau de débat contradictoire entre des jeunes, des journalistes et des militants des droits de l´homme. Mais curieusement, malgré ce vent de liberté, les leaders politiques et d´opinion tunisiens ne sont pas encore invités par les télévisions tunisiennes privées et publiques pour exprimer leur avis. Ainsi, ces leaders politiques qui sont par la même occasion candidats à la succession de Ben Ali, à l´image du patron du CPR Moncef Marzouki, du Parti communiste tunisien Hamma Hammani et surtout du mouvement Ennahda Rasheed Ghannouchi, ne se sont pas encore exprimés sur Nessma TV, Hannibal ou encore TVT. Seule Al Jazeera a réussi à accueillir ses personnes sur son plateau ou les faire intervenir par téléphone. Visiblement, la peur du système est toujours présente et les télévisions tunisiennes privées ou publiques ne veulent pas prendre position pour tel ou tel leader d´opposition. [email protected]