Les groupes radicaux palestiniens sont passés, hier, à l'action défiant Abou Mazen. Les groupes palestiniens de résistance ont frappé, hier, dans la bande de Gaza, plus exactement à Eretz (passage entre le territoire palestinien et Israël), occasionnant la mort de quatre soldats israéliens et en blessant quatre autres. Cette opération intervient quatre jours après le sommet d'Aqaba lors duquel le Premier ministre palestinien, Mahmoud Abbas, s'est engagé à «démilitariser l'Intifada» et à désarmer les groupes et mouvements de résistance. Ces derniers, qui avaient rejeté les conclusions du sommet d'Aqaba, n'ont donc pas tardé à donner leur réponse. Cependant ce qui est nouveau dans cette attaque, c'est le fait qu'elle soit conjointement revendiquée, dans un communiqué commun, par trois branches armées du mouvement national palestinien Hamas, Jihad islamique et Fatah, formation du président Arafat et du chef du gouvernement Abbas. Dans un communiqué adressé aux agences de presse, les groupes palestiniens indiquent: «Cette opération a été réalisée par Mohamed Abou Beid, 21 ans, des Brigades Ezzedine Al-Qassam (branche armée du Hamas), Moussa Sakhawil, 22 ans, des Brigades des Martyrs d'Al-Aqsa (groupe radical lié au Fatah) et Rami El-Bek, 22 ans, des Brigades Al-Qods (branche armée du Jihad islamique).» Ces trois volontaires ont été tués par des tirs de soldats israéliens. C'est la première fois, depuis le début de l'Intifada, que des groupes palestiniens participent ensemble à une opération. C'est dire le défi devant lequel se trouve Mahmoud Abbas, placé ainsi entre l'enclume israélienne et le marteau des radicaux palestiniens. Ni les uns ni les autres ne sont prêts à accorder un quelconque état de grâce à un Premier ministre qui découvre la difficulté de gérer un peuple sommé d'abdiquer ses droits. Les groupes palestiniens indiquent aussi qu'ils ont «décidé de poursuivre l'Intifada armée, car nous rejetons les conclusions du sommet d'Aqaba où la résistance a été assimilée à du terrorisme». C'est sans doute la principale erreur d'Abou Mazen qui s'est engagé à démilitariser l'Intifada sans exiger sa contrepartie: le retrait sans délai des forces d'occupation israéliennes. Faire chorus avec les Israéliens sur le terrorisme était, à tout le moins, maladroit. Hier, le porte-parole du gouvernement israélien, Avi Pazner, a déclaré menaçant: «Abbas doit traiter immédiatement de la question du terrorisme, sans attendre», avertissant: «Nous ne nous attendons pas à cent pour cent de résultats immédiatement, mais s'il ne combat pas les terroristes, nous le ferons nous-mêmes.» En fait c'est ce que Israël fait depuis près de trois ans sans parvenir à réduire la résistance palestinienne. En réalité, si Israël, avec ses énormes moyens militaires et de répression, ne parvient pas à contenir la résistance - qu'il persiste à assimiler au terrorisme - comment peut-on attendre, ou exiger, d'une Autorité palestinienne démunie de tout de réussir là où la puissance d'Israël a échoué? C'est le dilemme de Mahmoud Abbas qui, dépourvu du charisme d'un Yasser Arafat, s'est engagé un peu trop rapidement à lutter contre le «terrorisme» sans réelle garantie quant à l'édification de l'Etat palestinien. Certes, la lutte contre le terrorisme est aujourd'hui un thème très branché, mais il se trouve que le conflit palestinien est avant tout un dossier politique et pas seulement sécuritaire, comme s'obstine à le faire croire Israël, et demande une solution politique, qui ne peut qu'être négociée avec les combattants palestiniens. De fait, l'opération d'hier montre a contrario qu'Israël n'obtiendra pas la sécurité tant recherchée par la seule démonstration de force et que la paix se conclut avec ceux qui se battent sur le terrain.