et pour que la fête soit complète, les pouvoirs publics ont commencé, depuis lundi, à libérer les détenus. C'est dans une ambiance bon enfant marquée par une sérénité et beaucoup d'espoirs que les animateurs du mouvement citoyen s'apprêtent à fêter, aujourd'hui, le 2e anniversaire de l'adoption de la plate-forme d'El-Kseur, dans la même ville. Contrairement au précédent anniversaire, celui d'aujourd'hui intervient dans une conjoncture marquée essentiellement par l'offre sincère et responsable du Chef du gouvernement et les réponses apportées par les ârchs, dont le moins qu'on puisse dire, sont empreintes de pragmatisme, d'esprit de responsabilité et d'ouverture. Et pour que la fête soit complète, les pouvoirs publics ont commencé depuis lundi à libérer les détenus et à tolérer les réunions publiques répondant ainsi rapidement à deux des préalables avancés par le mouvement citoyen à toute prise de langue officielle. Cette initiative initiée par le comité de la société civile d'El-Kseur se déroulera, donc, sans crainte et sera rehaussée par la présence des ex-détenus sur un fond de chaudes retrouvailles entre les militants des quatre coins de la région. Ce sera aussi un moment fort de concertation entre les animateurs dont certains viennent tout juste de retrouver leur liberté. Outre l'exposition qui ornera les murs du hall d'entrée du centre culturel, Mouloud-Feraoun, les délégations des différentes wilayas marqueront cette journée par une réunion symbolique qui traitera des questions de l'heure. Les représentants des wilayas aborderont vraisemblablement la question du dialogue, même si cette rencontre n'a aucun caractère officiel. Le meeting populaire prévu juste après permettra aux uns et aux autres d'exposer leur point de vue sur cette nouvelle donne qui ne finit pas d'emballer la Kabylie. Sept cent trente jours se sont, donc, écoulés depuis la naissance de la plate-forme d'El-Kseur. Ce document en quinze points portant sur les revendications du mouvement de révolte né au lendemain de l'assassinat du jeune Massinissa Guermah, n'avait obtenu le consensus que difficilement. Ce n'est qu'après d'âpres et difficiles négociations que les délégués des wilayas de Béjaïa, Tizi Ouzou, Bouira, Boumerdès, Sétif, Bordj Bou Arréridj, Alger et le comité des étudiants des universités d'Alger ont pu adopter ce document devenu par la suite la seule référence de la structure interwilayas du mouvement. Les principales revendications soulevées par la rue - au cours des différentes manifestations des plus violentes qu'avait connues la Kabylie au cours des mois d'avril et mai 2001 - ont été retenues au cours de ce conclave à caractère extraordinaire. La marche prévue pour le 14 juin du même mois devait être couronnée par la remise d'une plate-forme de revendications au Président de la République d'où la nécessité de se concerter pour son élaboration. Une première tentative eut lieu à l'université de Béjaïa et avait abouti à l'adoption d'une plate-forme de 27 revendications réparties sur trois chapitres. Certaines délégations, à leur tête la Cadc de Tizi Ouzou, avaient jugé certaines d'entre elles partisanes en insistant sur la tenue d'une réunion extraordinaire que le comité d'El-Kseur s'était proposé d'abriter. La wilaya de Béjaïa était alors représentée par le comité populaire (Cpwb) d'obédience d'extrême gauche. Il avait fallu des heures et des heures de débat pour synthétiser enfin les revendications en quinze points scellés et non négociables. Depuis «la satisfaction pleine et entière de cette plate-forme de revendications» est devenue la principale exigence du mouvement citoyen qui a rejeté toutes les offres de dialogue du pouvoir. Le 31 octobre, soit à la veille d'un round de dialogue, qualifié de taiwan, la plate-forme sera explicitée lors d'un conclave à Larbaâ Nath Iraten. Pour cette année, la célébration de l'élaboration de cette plate-forme se présente sous de meilleurs auspices. L'espoir d'un dénouement heureux n'a jamais été aussi présent dans l'esprit de tout un chacun. Une réelle volonté anime présentement toutes les parties. Depuis deux jours, la rue retrouve son activité. Des cortèges de véhicules sillonnent les artères des villes, saluant la liberté des détenus qui, pour certains, depuis lundi, ont retrouvé leur famille. Bref, la Kabylie renoue avec sa vitalité et son enthousiasme. Ce sont là autant de signes qui augurent d'un avenir plus que prometteur.