La tentative d'assassinat du responsable de Hamas montre la nature réelle d'Israël et combien l'on est loin de la paix. Encore une fois Israël a recours à la force pour tenter d'annihiler la résistance palestinienne, encore une fois des dirigeants palestiniens, par définition des civils, sont la cible de l'armée d'occupation israélienne. Déjà, plusieurs dirigeants palestiniens ont été victimes, ces deux dernières années, de ces assassinats ciblés, parmi lesquels le secrétaire général du Fplp, (Front populaire de libération de la Palestine), Abou Ali Moustapha, tué en août 2001 par un missile lancé sur son bureau, à Ramallah, à partir d'un hélicoptère de combat. La tentative d'assassinat, mardi, du chef politique du Hamas, Abdelaziz Al-Rantissi, entre donc dans cet ordre des choses voulues par Israël, qui a toujours privilégié la force et la répression pour soumettre les Palestiniens. M.Bush avait beau dire son inquiétude, après coup, il n'en reste pas moins qu'il y a comme un défaut, lorsque l'on constate que la communauté internationale, qui n'a jamais manqué de condamner fermement les opérations de la résistance palestinienne, ne fait pas de même envers Israël, qui a commis mardi un acte criminel - outre la personne d'Al Rantissi -, surtout contre le processus de paix, maintes fois avorté par le fait d'Israël. Sharon, non content d'admettre officiellement, hier, la tentative d'assassinat de Abdelaziz Al-Rantissi, affirme qu'il «continuera d'agir contre tous les ennemis de la paix». Il semble, en l'occurrence, que le premier ennemi de la paix, est bien Ariel Sharon, à moins, ce qui apparaît certain, que le chef du gouvernement israélien ne parle de la paix «israélienne». Ce qui rendra caducs les fondements mêmes du processus de paix intitulé «feuille de route», qui prévoit la création d'un Etat palestinien indépendant à l'horizon 2005. Israël, qui prétend se faire justice en «soumettant» la résistance palestinienne à des représailles, complique en fait, la tâche de Mahmoud Abbas, lequel négociait une trêve avec les mouvements de la résistance palestinienne. Même le président américain, George W.Bush, n'a pas manqué de relever que l'opération israélienne contre Al-Rantissi a porté un mauvais coup au processus de paix en cours, déclarant: «Je suis perturbé par les récentes attaques israéliennes menées avec des hélicoptères d'attaque. Je regrette la perte de vies innocentes», ajoutant: «Je m'inquiète de ce que les attaques feront qu'il sera plus difficile, pour la direction palestinienne, de combattre le terrorisme. Je ne crois pas non plus que les attaques aident à la sécurité des Israéliens». Le président Bush, qui n'est pas allé jusqu'à condamner cette opération criminelle de l'armée israélienne d'occupation, ne s'en est pas moins exprimé, pour la première fois, sur les dépassements d'Israël jusqu'alors assuré de l'impunité et du silence complice de l'administration américaine. Les massacres de Jénine sont toujours frais dans les esprits, Israël interdisant même à une commission d'enquête de l'ONU de se déplacer au camp martyr palestinien de Jénine. Comme le note le journal israélien Yédiot Aharonot, la décision a été prise «sur la base d'une évaluation erronée de la réaction américain». Et c'est cette réaction qui faisait la différence. En effet, Washington n'avait pas réagi, ou très mollement, pour la forme, après les assassinats ciblés de dirigeants palestiniens, ni après les massacres de la population civile au camp de réfugiés de Jénine, parce que, à l'époque, il n'y avait pas de «feuille de route», et les Etats-Unis n'étaient pas engagés directement dans la recherche d'une solution. La donne a changé aujourd'hui, et ce sont les efforts des Etats-Unis, d'arriver à une solution entre Israéliens et Palestiniens, qui sont ainsi entravés par la décision irréfléchie de Sharon, qui ordonna l'assassinat d'Al-Rantissi. Cela, d'autant plus que cette action criminelle remet en cause aussi les efforts du Premier ministre palestinien, Mahmoud Abbas, de trouver un consensus avec les mouvements radicaux. De fait, après la tentative d'assassinat de l'un de ses dirigeants, le Hamas promet «un tremblement de terre» pour Israël. Ainsi, les brigades Ezzedine Al- Qassam du Hamas ont indiqué que «désormais toutes les options (militaires) sont ouvertes, nous attaquerons au coeur de l'ennemi sioniste, notre réplique sera de l'amplitude d'un tremblement de terre». Il n'est pas jusqu'au vieux leader spirituel de Hamas, Ahmed Yassine, de promettre des représailles avertissant que «à partir de maintenant, tous les civils israéliens sont des cibles». Le Hamas, demande en outre à Abou Mazen, (Mahmoud Abbas) de «prendre la seule décision responsable qui s'impose, à savoir stopper tous les contacts avec l'ennemi sioniste, abandonner la «feuille de route» et confirmer le droit de notre peuple de résister à l'occupation». Mis sur la défensive par la tentative d'assassinat d'Al-Rantissi, le Premier ministre palestinien, Mahmoud Abbas, qui s'est engagé à Aqaba à «démilitariser l'Intifada», en appelle à Bush pour que «l'administration américaine condamne cette attaque terroriste et avertisse des graves dangers auxquels la «feuille de route» est confrontée à la suite de l'attaque israélienne», exigeant «une action immédiate de la part des Etats-Unis pour enrayer cette sérieuse détérioration». En réalité, la tentative d'assassinat de Abdelaziz Al-Rantissi, admise officiellement à Tel-Aviv, est, au mieux, une provocation qui risque de susciter un arrêt, qui pourrait être long, de la «feuille de route», au pire, un retour au point zéro. Ce à quoi, Sharon était déjà parvenu avec le processus de paix d'Oslo qu'il vida de ses fondements et de son contenu. Il est clair qu'Israël, laissé maître de sa décision, n'admettra jamais à ses côtés un Etat palestinien souverain. Il appartient maintenant à la communauté internationale et plus spécialement aux Etats-Unis de faire appliquer, par Israël, les nombreuses résolutions de Conseil de sécurité, laissées en souffrance et jusqu'ici ignorées par les gouvernants israéliens.