Le responsable politique du mouvement palestinien Hamas, Khaled Mechaal, s'est longuement exprimé samedi à la télévision syrienne sur la situation à Ghaza en tirant les enseignements de l'agression israélienne aux plans militaire, humanitaire et géostratégique. Après plus de deux semaines d'une guerre inégale dans laquelle Israël a engagé toutes ses forces, aériennes, terrestres et maritimes contre une résistance palestinienne armée de la seule foi en la libération de son pays et de moyens de défense archaïques qui font beaucoup plus de peur que de mal aux Israéliens, les artisans de la résolution du Conseil de sécurité sur Ghaza ont choisi le moment pour faire adopter ce texte, non contraignant par ailleurs. Les puissances occidentales et les Etats-Unis, qui n'ont jamais caché leur soutien à Israël même en s'abstenant de voter – un geste tactique qui ne peut être autrement compris que comme un feu vert pour la poursuite de l'agression – pensaient que la résistance est suffisamment affaiblie pour obtenir sa capitulation. Avec le déluge de feu qui s'abat depuis plusieurs jours sur Ghaza et son lot de destruction et de victimes, la situation sanitaire et humanitaire catastrophique, l'aggravation du blocus sous les effets de la guerre avec la fermeture des derniers points de passage qui liaient Ghaza au monde extérieur et la destruction des tunnels. Le représentant du mouvement Hamas a rejeté clairement dans son intervention sur la chaîne de télévision syrienne la résolution de l'ONU, interpellant implicitement l'Egypte – co-auteur avec la France de l'initiative de « paix » pour Ghaza – sur le fait que l'on dénie aux Palestiniens de se défendre même avec de rudimentaires fusils qui pénètrent à travers la frontière égyptienne qu'on cherche à sécuriser au seul profit d'Israël. Pour le dirigeant du Hamas, Israël a déjà perdu politiquement et même d'une certaine manière militairement la guerre. Car reconnaître trois semaines après le début des hostilités que la guerre sera encore longue pour venir à bout d'une résistance sommairement armée, opérant dans un minuscule territoire à portée des canons israéliens et soumise, par dessus tout, à un blocus total en armes et autres logistiques, équivaut déjà à une défaite cuisante. L'intervention du responsable politique du Hamas contenait plusieurs volets. Après avoir loué et salué le courage et les capacités combattantes de la résistance – toutes factions confondues – face à la machine de guerre israélienne et aux pertes subies par l'armée de Tsahal, Khaled Mechaal s'est adressé au gouvernement israélien en lui demandant quel bilan peut-il offrir aux Israéliens et à leurs amis qui les soutiennent dans cette guerre et, d'une façon globale, dans sa guerre d'occupation de la Palestine. Premier revers pour Israël, commente le responsable politique de Hamas, les roquettes de la résistance palestinienne continuent de tomber sur les villes israéliennes avec une intensité jamais égalée, alors que l'objectif unique proclamé d'Israël en lançant son offensive sur Ghaza était de faire cesser les tirs de roquettes. Deuxième revers : Israël voulait à travers cette guerre venir à bout de la résistance palestinienne et décapiter le mouvement Hamas, et c'est le contraire qui s'est produit, remarque le dirigeant de Hamas. L'holocauste de Ghaza La sauvagerie de l'agression israélienne a créé des foyers de résistance dans chaque famille palestinienne, souligne le responsable de Hamas. Au plan politique interne d'abord, Khaled Mechaal s'est senti suffisamment légitimé par la résistance armée sur le terrain et la sauvagerie de l'agression israélienne pour interpeller le président de l'Autorité palestinienne qui presse le mouvement Hamas d'accepter la résolution de l'ONU. « Mahmoud Abbas doit rompre définitivement les négociations avec Israël s'il veut réellement réconcilier les Palestiniens entre eux », a-t-il déclaré. Le même appel, sur un ton grave et solennel, est lancé aux dirigeants arabes pour rompre tout lien diplomatique ou autre avec Israël. Dans le cas contraire, a-t-il observé, ils devront se préparer à rendre des comptes à leurs opinions publiques qui ont montré, à travers les manifestations de soutien dans toutes les capitales arabes, leur attachement à la cause palestinienne. Au plan stratégique, le dirigeant du Hamas a été très bien inspiré de puiser dans la rhétorique israélienne pour demander aux dirigeants arabes et à toutes les forces dans le monde, qui ont condamné les atrocités commises par l'armée israélienne à Ghaza d'aider les Palestiniens à faire juger par le tribunal international les dirigeants israéliens pour ce nouvel « holocauste » commis contre la population de Ghaza. « Israël, qui a pâti de l'holocauste, commet à son tour un nouvel holocauste à Ghaza », appuie Khaled Mechaal. L'agression israélienne a dévoilé, au fil des jours, ses véritables objectifs qui ne sont pas ceux proclamés par le gouvernement israélien, à savoir l'arrêt des tirs de roquettes sur les villes israéliennes à partir de Ghaza, mais géo-stratégiques consistant en la reconfiguration de la carte et des frontières de la région où il n'y aura nulle place pour un Etat palestinien. C'est dans les leçons de la tragique guerre contre Ghaza que le dirigeant de Hamas puise la force des arguments politiques de son mouvement pour souligner désormais la vanité de toute négociation de paix avec Israël.