Cet ancien député se permet de «tutoyer politiquement» de puissants hommes passés et présents, à l'instar du général Toufik et de Bouteflika. Abdelkader Hadjar remet ça. Mais il semble, cette fois-ci, qu'il ait franchi le Rubicon, de même que toutes les limites de la décence et du bon sens dus tous deux aux citoyens. A l'en croire, en effet, il serait une véritable lumière ignorée par tous, mais non point par les plus hautes autorités du pays, à commencer par le Président Bouteflika et le général Toufik, qui ne feraient pas un seul pas sans le consulter, sans avoir recours à ses conseils éclairés. Toutes ces déclarations ont été faites au Forum du journal El-Khabar dans son édition de jeudi. C'est, en effet, la première fois dans l'histoire de notre pays que le patron du DRS est cité, de manière aussi formelle et précise, dans des questions politiques où il n'est censé n'avoir aucun rôle à jouer. Des sources politiques proches du FLN, particulièrement indignées par cette dernière et scandaleuse sortie, soulignent qu'«au moment où l'Armée confirme son retrait de la scène politique, il en est, nostalgiques des temps des rentes politiques et des parrainages tribaux, qui ne se rendent pas compte que leur temps est révolu et que le meilleur service qu'ils pourraient rendre au pays serait de se taire à tout jamais». Hadjar, qui ne mesure sans doute pas la gravité ni la portée, de ses propos, se permet même de parler au nom de ces hauts responsables, notamment le général Toufik. Sans doute aveuglé par sa haine pour la ligne moderniste suivie présentement par le FLN, Hadjar ne se rend même pas compte des graves contradictions par lui commises lorsqu'il accuse Benflis d'avoir réduit la démocratie au sein du parti, tout en reconnaissant lui avoir fomenté des coups de force et placé des gens à la tête du FLN sans consulter le moins du monde sa base, de même que les négociations qu'il aurait eues secrètement avec les décideurs pour la nomination des ministres de ce parti n'ont jamais été entérinées par les militants qui, du reste, n'en ont jamais pris connaissance, si tant est qu'elles aient eu lieu un jour. Cet arabo-baâtiste, en abandon de son poste d'ambassadeur à Téhéran, serait derrière presque toutes les grandes décisions prises depuis le milieu des années 90. Il revendique, ainsi, à cor et à cri, le «coup d'Etat scientifique» qui a vu le renversement de Abdelhamid Mehri et son remplacement par Boualem Benhamouda. Il proclame, ce disant, avec un orgueil pour le moins démesuré et de mauvais aloi, que «le DRS n'a rien à voir là-dedans» étant lui-même «plus intelligent et plus compétent que les éléments de ces services». Le chef de ces derniers, lui, est «politiquement tutoyé» et littéralement «mangé à toutes les sauces». Dans son incommensurable et, surtout, inexplicable folie des grandeurs, Abdelkader Ha-djar soutient avoir négocié, pied à pied, en 97, la composante humaine du FLN au sein du gouvernement Ouyahia de cette époque, cela avec les personnages les plus puissants et les plus inaccessibles qui soient, du moins à une «petite pointure» de ce simple et ancien député de Tiaret. Curieusement aussi, cet homme, qui ne mérite rien moins que d'être radié des rangs de l'administration pour avoir abandonné son poste et «méprisé» la hiérarchie existante, n'est censé jouir d'aucune immunité. Il n'en continue pas moins, de la manière la plus ostensible qui soit, de revendiquer la «paternité» des coups de force opérés récemment contre de nombreuses mouhafadhate du FLN. Reconnaissant lui-même ces agressions, atteintes à l'ordre public, constitution de groupes de malfaiteurs, il est passible de sérieuses poursuites judiciaires. Il risque une forte peine d'emprisonnement. Mais à voir avec quel laxisme se comporte le parquet, censé s'autosaisir, attendu que Hadjar lui-même revendique ces graves méfaits, l'on serait presque tentés de croire que ce Monsieur dit vrai en se faisant passer pour l'homme le plus puissant du pays. Un homme tellement puissant, il faut le croire et le craindre en même temps, qu'il se permet d'agir allègrement en hors-la-loi, de s'en faire des glorioles et de narguer publiquement les institutions de la République censées veiller au respect et à la stricte application des lois en vigueur. Il confirme, au passage, avoir saisi, lui et ses « complices », le ministre de l'Intérieur dans le cadre de la phase II portant tentative de déstabilisation du secrétaire général du FLN, Ali Benflis afin de tenter d'invalider les résultats et résolutions du huitième congrès de ce parti. Il ne précise pas, cela dit, si Zerhouni est partie prenante ou pas de ce complot, comme le soutiennent les membres de la direction du FLN prêts, comme rapporté dans notre édition d'hier, à déposer une plainte contre le ministre de l'Intérieur à cause de «son parti pris» jugé flagrant en faveur des «mutins». L'ensemble des officiels cités de cette manière, et impliqués dans des basses besognes où ils n'ont sans doute rien à voir, est tenu de réagir avant que Hadjar, enhardi par ses «élucubrations» de plus en plus spectaculaires, ne dégoûte définitivement tous les Algériens de la politique. En attendant que l'Etat de droit se mette enfin en marche, cet homme, qui nous vient de Téhéran, aux frais du contribuable, confirme magnifiquement bien l'adage qui veut qu'«à beau mentir qui vient de loin...»