Le chef d'état-major a cité deux noms aux antipodes l'un de l'autre: Djaballah et Dilem. Dans un entretien accordé au journal égyptien Al-Ahram, le chef d'état-major de l'ANP a indirectement confirmé le degré de nuisance du Gspc en révélant que ce groupe a recruté 220 jeunes en 2002. Le général Lamari, qui évalue le nombre de terroristes en activité à quelque 700 éléments, affirme que l'ANP en a éliminé quelque 186 du Gspc et qu'au début du terrorisme en Algérie, les islamistes armés étaient 27.000, toutes organisations confondues. «Quand nous avons démarré (...) nous avions 27.000 terroristes armés, maintenant le nombre de terroristes actifs est estimé à 700, ils ne présentent pas de danger pour la République et les institutions du pays», insiste le général. Ces déclarations, même si elles confirment la reprise en main par l'institution militaire de la situation sécuritaire, n'en révèlent pas moins la persistance de la menace terroriste sur la société algérienne. En effet, le renouvellement des troupes opéré par le Gspc, amène à penser que le phénomène n'est pas totalement en déclin en Algérie. Le chef de l'état-major de l'Armée nationale populaire a réduit le danger du terrorisme sur la stabilité du pays à sa plus simple expression, mais affirme néanmoins que «l'existence de 10 hommes armés constitue un danger pour les citoyens». En d'autres termes, l'armée est passée du stade de la sauvegarde des institutions de l'Etat, à celui de l'éradication de la violence islamiste. A ce propos, le général Lamari est revenu, dans le même entretien, sur l'épisode de la suspension du processus électoral, en l'assumant totalement. Il citera, à titre illustratif, le discours développé par l'ex-FIS à la veille des législatives de décembre 91, notamment les déclarations des leaders du parti dissous sur la démocratie et la femme. «Lorsque nous avons pris la décision d'arrêter le processus électoral, notre but était la sauvegarde du système républicain et les institutions de l'Etat (...) même si cela nous mettait face à des milliers de terroristes», a-t-il affirmé. Mais le danger de janvier 1992 est totalement évacué, à en croire le chef d'état-major de l'ANP qui réitère la disponibilité de son institution à accepter le verdict des urnes, même si c'est un islamiste qui est porté au pouvoir. Mieux, Lamari n'hésite pas, comme pour appuyer sa déclaration, à avancer le nom du plus radical islamiste légal sur la scène politique nationale. «Je confirme que nous respecterons le choix du peuple, même si c'est Abdallah Djaballah, président d'El-Islah, qui est élu», insiste-t-il, en avançant une seule condition, celle du respect par le prochain Président, quelle que soit sa couleur politique, des règles du jeu démocratique. L'aisance dont semble faire montre le général Lamari sur la question de la sécurité de l'Etat l'amène à répondre sans détours aux deux sensibles questions de l'état d'urgence et du ministère de la Défense, non encore pourvu. Sur le premier dossier, il affirme clairement que l'annulation de la loi portant état d'urgence «ne pose aucun problème à l'armée. Depuis 4 ans, sa levée (l'état d'urgence Ndlr) n'influe en rien sur notre travail. Si la décision est prise demain, nous la saluerons (...) la levée de l'état d'urgence n'est pas du ressort de l'armée.» Cela dit, Lamari tient à préciser qu'une telle éventualité «ne signifie pas le retour de l'armée aux casernes. (...) Il y a des lois dans notre pays et le Chef du gouvernement est à même de faire appel à l'armée» pour assurer la lutte contre le terrorisme. Quant au ministère de la Défense, c'est sans complexe que le chef d'état-major de l'ANP révèle qu'il a, lui-même, demandé la nomination «d'un ministre civil de la Défense». Selon Lamari, c'est un responsable de ce rang qui serait apte à «défendre les intérêts de l'armée et répondre aux attaques diffamatoires dont elle fait l'objet de la part de la presse». A en croire le général de corps d'armée, sa fonction ne l'autorise pas à prendre ce genre d'initiatives, mais rappelle, tout de même, les actions en justice engagées par l'institution militaire contre certains titres qui, selon lui, ont gravement porté atteinte à l'image de l'ANP. Il citera le nom du caricaturiste Ali Dilem qui «m'a décrit comme le plus grand des voleurs, sans détenir la moindre preuve». Face aux détracteurs de l'armée, Lamari promet toute la fermeté de la loi. Enfin, dans cet entretien, le n°1 de l'Armée nationale populaire a remis les pendules à l'heure et éclairci quelques points sujets à polémique, mais n'a rien dit de bien nouveau sauf que le terrorisme recrute toujours en Algérie. C'est peut être cela qu'il faut retenir.