Intervention militaire française directe ou dénouement «entre Ivoiriens», comme l'affirme la France? L'enjeu est important pour le nouveau président Ouattara. Des zones d´ombre demeurent sur les circonstances de l´arrestation de Laurent Gbagbo lundi à Abidjan, malgré l´affirmation réitérée de Paris que l´ancien président a été arrêté par les forces d´Alassane Ouattara elles-mêmes, les soldats français n´apportant qu´un simple «soutien». Le camp Gbagbo a directement accusé hier les «forces spéciales françaises» voir «enlevé» le président sortant à sa résidence pour le livrer à Alassane Ouattara. Dans le même temps, le Premier ministre français François Fillon a réaffirmé que «pas un soldat français»n´avait mis les pieds dans la résidence. Intervention militaire française directe ou dénouement «entre Ivoiriens», comme l´affirme la France? L´enjeu est important pour le nouveau président Ouattara, dont la légitimité souffre déjà du soupçon d´avoir été porté au pouvoir par l´ancien colonisateur. Après une offensive éclair qui a vu toutes les grandes villes tomber aux mains des Forces républicaines de Côte d´Ivoire (Frci, pro-Ouattara), ces dernières buttaient depuis des jours contre les derniers bastions de Laurent Gbagbo à Abidjan. Dès samedi, il est apparu évident que les Frci étaient incapables d´en finir seules avec le régime de Gbagbo. Non seulement l´ancien président était toujours terré dans son bunker mais ses partisans parvenaient à gagner du terrain et à attaquer le quartier général de Ouattara. La décision a été prise d´accélérer le mouvement. Dimanche, les forces de l´ONU (Onuci) et les hélicoptères de la force française Licorne pilonnent les armes lourdes autour de la résidence de Laurent Gbagbo, pour préparer l´assaut des Frci. Lundi matin, les hélicoptères français tirent encore des missiles vers la résidence. «L´Onuci a été en tête, ce sont les hélicoptères de l´Onuci qui ont commencé à bombarder et la France, comme on nous l´a demandé, est venue en soutien», a souligné hier le ministre des Affaires étrangères, Alain Juppé. Officiellement ensuite, Licorne s´en tient à son rôle de «soutien» des forces de l´Onuci. Selon l´état-major, les soldats français sont «redéployés sur les axes stratégiques» pour empêcher les pro-Gbagbo de «commettre des exactions» dans les quartiers populaires d´Abidjan. Un redéploiement notamment de 200 à 250 hommes pour contrôler le boulevard de France, «à environ 1,5 km de la résidence». L´état-major martèle également qu´ «à aucun moment les forces françaises n´ont pénétré dans les jardins ou la résidence» de Laurent Gbagbo. Ce qui n´exclut pas que les soldats français aient percé les dernières défenses des pro-Gbagbo pour permettre aux forces de Ouattara de pénétrer dans la résidence en milieu de journée. Paris dément également toute implication des «forces spéciales» françaises dans l´opération. La règle est toutefois d´en dire le moins possible sur les actions auxquelles participent ces troupes d´élite entraînées pour des missions compliquées, ce qui limite la portée du démenti de l´état-major. Le chef d´état-major des armées, l´amiral Edouard Guillaud, a fourni en revanche une indication de l´intensité de l´engagement français: pas de blessés côté français mais un volume de munitions «de quelques milliers d´obus de 20 mm et quelques dizaines de missiles» utilisés au cours des derniers jours, a-t-il indiqué lors d´une conférence de presse. Ce qui traduit un engagement décisif, sans lequel les forces du nouveau président ivoirien n´auraient pas été en mesure de faire prisonnier Laurent Gbagbo. Des éléments incontestables existent-ils sur le déroulement de l´opération? Hier, le ministre français de la Défense Gérard Longuet s´est dit «absolument certain que nous aurons des images de toute l´opération». «Non pas de l´armée française, mais de l´ensemble des acteurs, et on saura qu´aucun soldat français, aucun soldat de l´Onuci n´est rentré dans la résidence présidentielle», a-t-il répété.