«Les dictatures fomentent l´oppression, la servilité et la cruauté; mais le plus abominable est qu´elles fomentent l´idiotie.» Jorge Luis Borges Pourquoi Al Jazeera ne couvre pas les événements en Syrie avec la même intensité qu´elle a couvert la Tunisie ou l´Egypte? En réalité, Al Jazeera semble orienter sa vision vers la Libye et le Yémen, alors que la révolte syrienne est réprimée dans la violence la plus extrême par les hommes de Bachar El-Assad. Alors que les jingles sur El Gueddafi, Moubarek et Ben Ali, inondent la chaîne qatarie, aucune image dévalorisante de Bachar El Assad n´est diffusée sur la Toile arabe. Contrairement à la révolution dans les autres pays arabes, la Syrie ne fait pas encore partie des pays arabes à bousculer et le chef du régime de Damas l´a bien compris et a donné des orientations à ses 15 services de renseignements (les plus importants et les plus efficaces dans le monde arabe) pour verrouiller l´espace médiatique aux médias étrangers. Aucun média occidental ou arabe ne couvre les soulèvements en Syrie. The New York Times relate les événements depuis Le Caire, The Washington Post depuis Beyrouth. Reuters a des correspondants à Damas, et les représentants des chaînes arabes comme Al Jazeera et Al Arabya couvrent du Caire et du Liban. YouTube, Facebook et Twitter sont presque les seules sources d´informations venant de Syrie à travers des reporters anonymes qui risquent parfois leur vie pour transmettre une photo ou une image. Certaines images sont même insoutenables et les blogueurs n´hésitent pas à les diffuser pour choquer l´opinion internationale. Ces images transmises via Internet, ne passent ni par un comité de rédaction ni par un responsable qui gère la déontologie et l´éthique et encore moins par un journaliste dont la mission est de transmettre les preuves de ses écrits par l´image ou le reportage. Aujourd´hui, c´est devenu une certitude les médias internationaux sont manipulés. Al Jazeera, qui a couvert les premières révolutions arabes et qui s´est vantée du rôle qu´elle a joué dans la destitution de Ben Ali et de Moubarak, protège El Assad, parce que la Syrie est considérée comme la véritable menace et le point de résistance contre Israël. Sa chute affaiblirait le Hezbollah et le Hamas, ses bras armés non déclarés dans le Moyen-Orient. C´est d´ailleurs le même manque d´enthousiasme qui a caractérisé la couverture par la chaîne de l´Intifadha libanaise contre la Syrie, en 2005, affirme un journaliste américain. Selon lui, il est plus facile d´attaquer les présidents yéménite, libyen ou égyptien, qui sont ou étaient tous, à leur manière, des «traîtres» à la cause arabe, que de critiquer Bachar El Assad. Même Al Arabiya marche pour une fois sur la même ligne éditoriale qu´Al Jazeera, l´Arabie Saoudite et le Qatar partagent enfin le même désir d´éviter une crise en Syrie, par crainte du chaos qui pourrait en résulter. Une situation qui déplait aux Occidentaux qui soutiennent, pour leur part, la chute du régime de Bachar El Assad pour protéger Israël. Mais ils restent impuissants et ne peuvent intervenir surtout après l´échec de la campagne anti-El Gueddafi et surtout avec l´absence d´un retour d´onde de la télévision ennemie des pays totalitaires arabes: Al Jazeera. [email protected]