Pour ne point changer, la Ligue des Etats arabes s´est donné dimanche, un nouveau secrétaire général, en la personne du chef de la diplomatie...égyptienne, Nabil el-Arabi, le bien nommé, en remplacement de son compatriote, l´inénarrable Amr Moussa qui, désormais, a des ambitions nationales, postulant à la chefferie de l´Etat égyptien. On se demande si le Monde arabe gagnera au change. Et la Ligue arabe dans tout ça? En vérité, le problème n´est guère dans la personne du nouveau secrétaire général de la Ligue, M. El-Arabi, - malgré son âge plus que respectable de 75 automnes - mais bien le fait que l´Egypte, en dépit du «changement» de régime, garde la haute main sur le machin qualifié de «Ligue arabe». Or, tout compte fait, cet organe n´est en fait que l´annexe du ministère égyptien des Affaires étrangères. La «Ligue» sert en vérité de voie de garage et/ou de retraite dorée pour diplomates turbulents, soit concurrents potentiels pour l´accès au pouvoir. Quelle qu´en soit la finalité, ce qu´il faut relever est que la règle - non écrite, nous dit-on - est respectée par l´accession d´un énième chef de la diplomatie de l´Egypte à la tête de l´organisation panarabe. Cela assure à tout le moins la stabilité pour diplomates égyptiens en préretraite. Dans la pratique, cette organisation est la chasse gardée de l´Egypte, depuis sa création en mars 1945, et sert au recyclage du personnel politique et diplomatique égyptien en fin de carrière. Plus, 80% du personnel de la Ligue arabe est égyptien. Merci pour eux! Aussi, la question qui se pose aujourd´hui est bien de savoir de quelle utilité est la Ligue arabe, outre d´être un point de chute aux diplomates égyptiens pour services, rendus? De tous les organismes similaires de par le monde, la Ligue arabe se caractérise donc par son mode de fonctionnement, en étant quasiment phagocytée et placée sous la tutelle du pays d´accueil: l´Egypte. Alors qu´elle aurait dû être représentative de l´ensemble des pays la composant, la Ligue arabe n´est au final que le reflet de la politique égyptienne. Aussi, la Ligue ne dispose d´aucune autonomie par rapport à ses Etats membres et surtout par rapport au pays d´accueil qui lui aurait permis d´être plus crédible et d´oeuvrer pour une véritable politique arabe qui prenne en compte avant tout, les intérêts du Monde arabe. Cela explique en fait les carences et ratages de la Ligue arabe qui s´est surtout signalée par son décalage au regard des événements qui marquent notre région. Cela explique également son effacement par rapport à la question palestinienne, en ne réussissant même pas à se faire admettre, ne serait-ce que comme consultant, dans le Quartette pour le Proche-Orient (USA, UE, ONU, Russie) alors qu´Israël y siège par le biais des Etats-Unis et de l´Union européenne. Cela, à titre de rappel. Au moment où le Monde arabe vit une «révolution» sans précédent, la Ligue arabe, qui devait, aurait dû, être aux avant-postes, s´est retranchée dans le méchant rôle d´auxiliaire de l´UE et de l´Otan. Quelle déchéance! Les tuteurs de la Ligue arabe ne semblent pas s´apercevoir que le monde a changé, que si le Monde arabe veut jouer un rôle dans les affaires mondiales - comme son poids financier et ses richesses énergétiques l´y autorisent - il doit impérativement se réformer. Réformes que les peuples arabes réclament maintenant avec force. En réalité, l´échec de la Ligue arabe est d´abord celui de l´Egypte de Moubarak. En 54 ans d´existence, l´Europe des 27 a aboli ses frontières internes. En 65 ans de présence de la Ligue, les frontières internes arabes sont plus hermétiques qu´elles ne l´ont jamais été. La main de fer de l´Egypte a laissé la Ligue arabe à l´état d´avorton inaccompli, sans pouvoir, sans perspective, sans répondant. Aussi, pour que la Ligue ait sa raison d´être, il faut d´abord que les dictatures arabes tombent, que le monde Arabe change. Pour accéder à la modernité il y a un prix à payer et il faut bien, vaille que vaille, s´y résoudre.