L'Autre monde le huitième long métrage de Merzak Allouache sera projeté, en avant-première mondiale, le 25 octobre en Algérie alors que sa sortie en France est prévue pour le 7 novembre. Prévue pour la rentrée, la sortie du film a été retardée en raison des événements du 11 septembre. Pour ce nouveau film, l'auteur de l'inoubliable Omar Gatlato s'est attaqué directement au phénomène du terrorisme en Algérie, et ce après plusieurs tentatives avortées dans Bab-El Oued City et Alger Beyrouth. Le réalisateur fut sans doute poussé par ses producteurs, qui ont vu la possibilité de réaliser un film sur le thème de la violence en Algérie, après avoir découvert Là-bas mon pays d'Alexandre Arcady. Intitulé L'autre monde, le film d'Allouache n'a rien à voir avec une suite de Jurassic Park. Il raconte l'histoire de Yasmina, qui, sans nouvelles de son fiancé Rachid parti sur un coup de tête s'engager dans l'armée algérienne et inquiète de son silence, part à sa recherche en Algérie. Là-bas, elle apprend qu'il est tombé dans une embuscade sanglante tendue par les terroristes. Persuadée qu'il est vivant, Yasmina poursuit sa recherche et s'enfonce au coeur de l'Algérie bravant la violence et le terrorisme. Surveillée par les uns et traquée par les autres, l'héroïne du film est aussi aidée dans sa quête de la vérité et découvre les contradictions d'un pays déchiré. Encore une fois, Merzak Allouache fait un film sur commande. Le film qui s'intitulait au départ Le journal de Yasmina a curieusement changé de titre pour être finalement Un autre monde comme quoi l'Algérie est un autre monde où règne la violence et l'anarchie totale. Encore une fois, Merzak Allouache se démarque du cinéma algérien et opte pour le compte d'un cinéma d'outre mer, où l'image de l'Algérie n'est pas toujours la meilleure. D'abord, il y a cette volonté de ramener un personnage venu d'un «autre monde» pour imposer une langue et une culture, qui ne sont pas toujours partagées en Algérie. Il y a aussi, cette manie de mettre en avant la femme, comme seule défenseur de la liberté et de la démocratie. Une image qu'on a souvent retrouvée dans Cheb de Rachid Bouchareb, Rachida, d'Amina Chouikh ou encore là-bas mon pays d'Alexandre Arcady, et qui devient par la force des choses une ligne à respecter. En s'attaquant à la violence terroriste, Allouache n'épargne pas pour autant le pouvoir qu'il qualifie d'incompétent et d'irresponsable. Normal quand ce n'est pas l'Algérie qui produit le film. Car, il faut savoir que L'autre monde est un film français, produit en grande partie par le «fonds du Sud», un organisme français, qui a énormément aidé les réalisateurs algériens à faire leurs films. Les derniers bénéficiaires de cette bouffée d'oxygène financière, ce sont Amina Chouikh avec un budget de 700.000 FF pour la réalisation de son film Rachida. Mohamed Chouikh bénéficiera, lui aussi, d'un budget conséquent pour réaliser un film sur la vie de Hasni. Reste que la seule satisfaction de ce film d'Allouache est ce réalisme furtif qu'on découvre à travers quelques scènes de la vie quotidienne algérienne. Les autres images imposées par la production et qui ne correspondent pas à notre vision culturelle sont destinées à un autre public, à un autre monde, ceux-là mêmes qui ont fait de Merzak Allouache le cinéaste le plus controversé du cinéma algérien. Depuis son installation en France, le réalisateur a fait cinq films: Un amour à Paris, Bab El Oued City, Salut cousin, Alger Beyrouth et puis le dernier L'autre monde. Deux ont été tournés entièrement en Algérie, mais le paysage audiovisuel algérien n'en profitera jamais, puisque aucun de ces films n'a été diffusé sur l'Unique et Merzak Allouache est même banni de l'antenne algérienne, puisqu'il n'a jamais accordé d'interview aux journalistes du petit écran. D'ailleurs, le cinéaste est connu pour son manque de communication et son hostilité au système. Ce même système qui lui accordé, à chaque fois, les autorisations de tournage et les moyens de production. Aujourd'hui, avec plusieurs années passées derrière la caméra, Merzak Allouache, le réalisateur algérien le plus prolifique de sa génération, reste le moins connu de son pays.