Le siège du journal El Moudjahid Le lendemain de l'assassinat de Abane Ramdane, le quotidien El Moudjahid avait annoncé que Abane était «tombé au champ d'honneur». Le quotidien El Moudjahid a célébré, hier, au niveau de son siège à Alger, en collaboration avec l´association Machâal Chahid, son 55e anniversaire. Une conférence a été animée conjointement par Réda Malek, qui était à la tête de la publication dans sa version francophone de 1957 à 1963, et M.El Mili, responsable de la version arabophone. La conférence a porté sur les circonstances de la création du journal, en juin 1956, en pleine lutte armée. Rédha Malek a souligné dans son intervention le rôle joué par cette publication, notamment dans la mobilisation des gens et la défense des idéaux de la Révolution algérienne. Il a souligné que les journalistes qui ont travaillé à l´époque dans ce journal étaient d´un haut niveau intellectuel quand ils étaient engagés pour la Révolution. Il a appuyé le cas de Frantz Fanon qui a rejoint El Moudjahid après avoir démissionné de l´hôpital psychiatrique de Blida, expliquant que le système colonial est un facteur de maladies psychiatriques. M.Malek a ajouté que «le fameux journal de la Révolution» était l´organe du FLN historique et que son équipe était homogène. La liberté de ton, tout en respectant la ligne bien définie du journal était garantie, notamment à l´époque où l´architecte du Congrès de la Soummam, Abane Ramdane, était responsable de la publication. «On retient, pendant cette époque, cette capacité de travailler sous une autodiscipline. Krim et Abane, membres du Comité de coordination et d´exécution (CCE) nous laissaient écrire librement», a souligné le conférencier. Concernant le contenu de la publication, M.Malek a souligné que celui-ci devait obéir à l´idée fondamentale de l´indépendance nationale. «C´était audacieux d´en parler à l´époque dans un contexte où il était dangereux d´évoquer le mot «indépendance» et Abane pose comme préalable à toute négociation avec le colon, la reconnaissance de cette demande», a-t-il expliqué, ajoutant que cette situation a duré jusqu´à la création du Gouvernement provisoire de la République algérienne (Gpra) en 1958. Le conférencier, qui a souligné qu´El Moudjahid était l´organe idéologique et une école de la Révolution a rappelé que l´idéologie de ce journal était de combattre le colonialisme et non la France ou son peuple. Il a indiqué que la notion de «Révolution démocratique» était destinée à disqualifier les attaques françaises qui qualifiaient les maquisards de fellagas, mais aussi une réponse aux nationaux qui tablaient seulement sur la nécessité de chasser les Français. Le conférencier est revenu, également, sur l´épisode où les autorités coloniales trafiquaient le journal en y éditant des articles dénigrant le FLN. Interrogé sur la Une d´El Moujahid dans son édition au lendemain de l´assassinat de Abane, qui annonçait sa mort au champ d´honneur, M.El Mili a indiqué qu´il ne pouvait en être autrement à l´époque. «On ne pouvait pas écrire à l´époque que Abane était assassiné par ses frères car il y avait un ordre qui était donné d´écrire ce qui avait été écrit», a-t-il dit, précisant que «par qui était donné l´ordre, on ne le sait pas». La question reste donc posée.