Les quatre membres du Hezbollah accusés d'implication dans le meurtre du dirigeant libanais Rafic Hariri doivent être jugés, a affirmé mardi soir l'ex-Premier ministre Saad Hariri et fils de Rafic, critiquant la campagne du parti chiite contre le tribunal de l'ONU. «Même si Hassan Nasrallah (chef du Hezbollah) tient 300 conférences de presse, il ne changera en rien l'acte d'accusation remis» par le Tribunal spécial pour le Liban (TSL), a affirmé M. Hariri dans une interview télévisée, la première accordée depuis des mois après la chute de son cabinet en janvier. «Il y a des personnes accusées, elles doivent maintenant comparaître devant le tribunal», a-t-il déclaré depuis Paris à la chaîne libanaise MTV. Le TSL avait remis le 30 juin un acte d'accusation sous scellés et quatre mandats d'arrêt dans le cadre de l'enquête sur l'attentat qui avait coûté la vie à Rafic Hariri et 22 autres personnes le 14 février 2005 à Beyrouth. Quatre membres du Hezbollah sont soupçonnés d'avoir appartenu à une cellule chargée de planifier et de perpétrer l'attentat à la camionnette piégée, selon la presse locale. Mais le puissant parti, soutenu par la Syrie et l'Iran, a exclu l'arrestation de ces membres et rejeté toute décision émanant du tribunal qu'il accuse d'être un «complot israélo-américain» visant à le détruire. «Hassan Nasrallah a dit qu'aucun gouvernement, même présidé par Saad Hariri, ne peut les arrêter, mais moi j'affirme qu'un gouvernement de Saad Hariri les aurait recherchés et livrés au tribunal», a poursuivi l'ex-Premier ministre. Le Hezbollah «sait où se trouvent les accusés et ne va pas les livrer». L'assassinat de Rafic Hariri avait divisé le Liban en deux camps politiques, menés par le sunnite Saad Hariri et le chiite Hassan Nasrallah, plongeant le pays dans une période de crises successives et d'assassinats. C'est la première fois que M. Hariri, absent du pays depuis plusieurs mois, s'exprimait après le passage de son camp à l'opposition en mars. En janvier, le Hezbollah et ses alliés ont provoqué la chute de son gouvernement, le parti chiite ayant tenté pendant des mois de le convaincre de désavouer le tribunal, en vain. Depuis, le camp du parti chiite domine le nouveau gouvernement de Najib Mikati, qui se considère comme indépendant. «Comment (le Hezbollah) peut-il dire que ce tribunal est israélien' lorsque le Premier ministre lui-même affirme qu'il respecte la résolution 1757 (du Conseil de sécurité de l'ONU qui a créé le TSL)», a demandé M. Hariri, accusant le gouvernement d'être un «instrument» entre les mains du puissant parti. Il a également évoqué ses «craintes» concernant le financement du tribunal international, assuré à hauteur de 49% par Beyrouth. Le Hezbollah s'est opposé en 2010 à l'introduction de la clause du financement du TSL dans le budget. Par ailleurs, M. Hariri a qualifié la répression en Syrie de «crime» et d' «injustice», tout en affirmant qu'il ne s'ingérait pas dans les affaires de l'ancienne puissance de tutelle au Liban. Il s'est dit «complètement solidaire du peuple syrien». «Il y a 2 000 martyrs maintenant en Syrie, sont-ils tous des terroristes?». M. Hariri, qui est soutenu par les Etats-Unis et l'Arabie Saoudite, a accusé le président syrien Bachar Al Assad et le chef du Hezbollah d'avoir pris la décision de le «chasser du pouvoir».