Alger et Islamabad vont jeter les bases d'une nouvelle étape dans leurs rapports bilatéraux. Insuffler une nouvelle dynamique dans les échanges commerciaux, raffermir les liens entre opérateurs économiques des deux pays et mettre en place un conseil mixte d'hommes d'affaires algéro-pakistanais, tels semblent être les objectifs déclarés de la visite aujourd'hui dans notre pays du président de la République islamique du Pakistan, M.Pervez Musharraf. Venant de la Tunisie voisine, première étape de sa tournée maghrébine qui le conduira également au Maroc, le voyage du chef de l'Etat pakistanais au Maghreb intervient au lendemain d'un périple de trois semaines effectué aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en France. Pour d'aucuns, les efforts diplomatiques du président Musharraf visant à améliorer l'image de son pays dans le reste du monde fortement détérioré depuis les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, son voisinage avec l'Afghanistan des ex-talibans et ses convulsions sanglantes internes, sont confortés par ses multiples déplacements un peu partout dans le monde. En tout cas, celui d'aujourd'hui à Alger, s'il s'inscrit dans cette vaste stratégie planétaire du Pakistan, n'en obéit pas moins à des considérations plus pratiques de renforcement des relations bilatérales entre deux pays émergents du tiers-monde et de surcroît, appartenant à une même religion, l'Islam. Arrivant à la tête d'une importante délégation qui comptera dans ses rangs, entre autres, le chef de la diplomatie pakistanaise, M.Khurshid Kasuri et le président du bureau des exportations Tarik Ikram, cette première visite en Algérie du général président depuis 1999, date de son arrivée au pouvoir et la seconde d'un responsable pakistanais de ce niveau après celle de Benazir Bhutto, se veut le point de départ d'une nouvelle phase dans les rapports entre les deux pays. En effet, dès avant-hier lors de l'audience accordée à l'ambassadeur pakistanais à Alger, M.Kausar Ahsan Iqbal, par notre ministre du Commerce, M.Noureddine Boukrouh, les deux parties sont convenues de faire de cette visite à Alger «une étape importante» dans les relations bilatérales et le «point de départ d'une ère nouvelle de coopération économique dense, durable et fructueuse pour l'Algérie et le Pakistan». Auparavant, le communiqué de la présidence algérienne annonçant la venue de Musharraf en Algérie avait laissé entendre que plusieurs accords de coopération seraient signés au cours de cette visite, ce qui «illustre la détermination de l'Algérie et du Pakistan à consolider les relations bilatérales ainsi que la concertation sur les questions d'intérêt commun». Mais, comme chacun le sait, les domaines de coopération et d'échanges commerciaux entre les deux pays sont négligeables. Mis à part quelques produits (coton, riz et quelques épices), le volume des échanges entre les deux pays reste insignifiant, pour ne pas dire inexistant. En fait, c'est sur le front de la lutte internationale contre le terrorisme que les deux parties sont foncièrement engagées à travers des points de vue rapprochés sinon très convergents. D'ailleurs, au printemps dernier, la visite à Alger du ministre de l'Intérieur pakistanais, M.Makhdoom Sayed Faysal Saleh Hayat, avait permis aux deux pays de signer une convention judiciaire d'extradition de criminels, notamment d'islamistes présumés terroristes. Il va de soi que ce volet occupera une grande place dans l'agenda des entretiens que le président Musharraf aura avec les responsables algériens, notamment le Président Bouteflika durant son séjour à Alger. Vu par les analystes comme un relais important de la stratégie américaine de la lutte internationale contre le terrorisme, le Pakistan de Musharraf est un passage obligé pour tout pays qui veut se prémunir contre le fléau du terrorisme devenu désormais planétaire. Dans ce cadre, sa virée en Algérie - pays qui a vécu plus d'une décennie de terrorisme - et dans le Maghreb ne peut être que bien vue, sinon encouragée par la communauté internationale. Et c'est tant mieux pour les deux pays.