Comment en ce troisième millénaire, au XXIe siècle, peut-on encore parler de famine? Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé à réunir d'urgence 1,6 milliard de dollars rien que pour la Somalie où «des enfants et des adultes meurent chaque jour à un rythme terrifiant». Nouvelle alerte dans la Corne de l'Afrique: L'organisation de l'ONU pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a convoqué aujourd'hui à Rome une réunion d'urgence pour venir en aide à quelque 12 millions de personnes frappées par la sécheresse et enrayer une famine meurtrière. Selon l'ONU, des dizaines de milliers de personnes sont mortes ces dernières semaines, victimes de la sécheresse qui touche toute la région: Somalie, Ethiopie, Kenya, Djibouti, Soudan et Ouganda. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé à réunir d'urgence 1,6 milliard de dollars rien que pour la Somalie, où «des enfants et des adultes meurent chaque jour à un rythme terrifiant». «Les retards peuvent causer encore plus de morts», a-t-il prévenu alors que les agences de l'ONU n'ont reçu que la moitié de la somme nécessaires aux programmes d'assistance. Près de la moitié de la population, 3,7 millions de personnes, est en situation de crise en Somalie, où deux régions du Sud ont été déclarées en situation de famine par les Nations unies, qui parlent de la «plus grave crise alimentaire en Afrique» en 20 ans. Les agences spécialisées de l'ONU cherchent également un moyen de livrer l'aide alimentaire alors que les deux régions les plus touchées sont sous contrôle des insurgés islamistes shebab, qui en interdisent l'accès aux organisations humanitaires. Après avoir salué la décision du Programme alimentaire mondial (PAM) de reprendre les livraisons d'aide alimentaire, les shebab ont fait marche arrière. «Il y a eu des négociations avec les shebab menées par les acteurs en Somalie et dans la région. Il y a eu des promesses, mais ce n'est pas encore satisfaisant», a expliqué la directrice des opérations d'urgence de la FAO, Cristina Amaral. La directrice du PAM, Josette Sheeran, a annoncé jeudi depuis Mogadiscio que son organisation lancerait «dans les prochains jours un pont aérien» pour fournir une aide alimentaire spéciale aux enfants de la capitale somalienne Mogadiscio «qui en ont un besoin désespéré». Pour affronter la crise régionale, la seule FAO demande 120 millions de dollars supplémentaires pour la Corne de l'Afrique, dont 70 millions pour la Somalie et 50 millions pour l'Ethiopie, le Kenya, Djibouti et l'Ouganda. Samedi, la commissaire de l'Union européenne à l'aide humanitaire Kristalina Georgieva a promis 27,8 millions d'euros (40 millions de dollars) supplémentaires, lors d'une visite dans le plus grand complexe de camps de réfugiés du monde (près de 400.000 personnes), Dadaab, dans l'est du Kenya, à la frontière de la Somalie. L'UE avait déjà offert 70 millions d'euros. Outre la sécheresse et la guerre civile, qui a poussé sur les routes de l'exil des centaines de milliers de Somaliens, la crise a été exacerbée par la flambée des prix du carburant et des produits alimentaires. Selon les experts de la FAO, le maïs et le sorgho étaient vendus le mois dernier à Mogadiscio aux prix record respectifs de 660 et 670 dollars, soit une augmentation de 106 et 180 pour cent. Cette question devrait être au centre de la réunion d'aujourd'hui, organisée à la demande de la France qui préside le G20. «C'est une réunion d'urgence déclenchée par l'escalade de la famine. Son objet principal est d'attirer l'attention des dirigeants de la planète, c'est un appel aux politiques pour qu'ils se penchent sur les racines du problème de l'insécurité alimentaire», a expliqué Mme Amaral. Les participants examineront aussi des solutions sur le long terme, comme l'aide aux paysans et aux éleveurs, ou l'introduction de plantes plus résistantes à la sécheresse. Le ministre français de l'Agriculture, Bruno Le Maire, y participera, aux côtés du directeur général de la FAO Jacques Diouf, de Mme Sheeran, de la responsable de l'ONG britannique Oxfam ainsi que des ministres de Djibouti, du Soudan, du Soudan du Sud et d'Ouganda.