Pris à son propre piège, le Maroc est contraint de «jouer» à visage découvert : celui d'un Etat colonialiste, velléitaire et expansionniste. Le plan Baker, ou plan de la dernière chance, a suivi un long cheminement issu des accords de Houston sur la base desquels, rappelle malicieusement Sadek Bouguettaïa, «le Maroc, dirigé à l'époque par Hassan II, reconnaissait l'existence d'un Etat dénommé République arabe sahraouie et populaire, et acceptait même l'idée d'aller vers un référendum d'autodétermination de ce peuple». Par la suite, le royaume chérifien a usé de tous les subterfuges pour que ce vote, souhaité par toute la communauté mondiale, n'ait jamais lieu. Il a, ce faisant, «joué sur le nombre d'électeurs puisque la Minurso, sur la base des témoignages des tribus et des notables, en a recensé 86.000 alors que le Maroc en a présenté 120.000 dans une volonté manifeste de tronquer d'avance les résultats». Et de lancer en guise de défi : «Si le Maroc pense réellement que le Sahara occidental lui appartient, pourquoi n'accepte-t-il pas simplement que le peuple sahraoui se détermine en toute indépendance et en toute transparence.» Le plan Baker, comme rapporté par le Conseil de sécurité de l'ONU la semaine passée, prévoit, sur une durée de cinq années, de placer les territoires sahraouis sous un large contrôle marocain, accordant au royaume chérifien la gestion de la défense, des relations étrangères, des richesses naturelles et même de la sécurité intérieure. Normal, donc, au moment de la réception du document, remis il y a de cela quelques mois aux parties concernées lors d'une tournée de l'ancien chef de la diplomatie américaine dans la région, que le Maroc l'ait vu d'un bon oeil alors que la Rasd s'y soit farouchement opposée. Mais comme des Etats observateurs comme l'Algérie et la Mauritanie avaient eux aussi été consultés et avait bénéficié d'un délai pour formuler des propositions, il semble que le Maroc se soit laissé prendre à son propre piège. Lui qui, publiquement, prônait une solution politique et concertée, se voit obligé de rejeter le plan Baker parce que ce dernier a ajouté qu'un référendum d'autodétermination devra se tenir à l'expiration du délai de cinq années de gestion des territoires sahraouis. Le Maroc, qui a déjà voulu s'approprier la Mauritanie, qui est entré en guerre contre l'Algérie pour lui prendre de force certains de ses territoires, compte épuiser toutes ses forces dans sa volonté d'annexer le Sahara occidental. Le recours à un autre conflit armé n'est, de ce fait, guère à exclure...