Le spectre des pandémies que l'on croyait disparues plane. «Pas de panique, la situation est totalement sous contrôle.» Que de fois, confrontés à des situations de crise majeure, les Algériens ont dû, pour être, un tant soit peu rassurés, se contenter de déclarations, souvent laconiques, de responsables censés veiller à leur bien-être et à leur sécurité. La dernière sortie de ce type a été formulée par le ministre de la Santé, M.Aberkane, dont le département est, actuellement, sérieusement mis à mal depuis l'apparition récente de plusieurs cas de peste signalés à l'ouest du pays et autres épidémies de méningite dont on s'empresse de souligner le caractère «bénin». Il faut dire que le laxisme latent des diverses autorités chargées, de près ou de loin, de surveiller la bonne qualité de l'environnement des Algériens, a fini par transformer le littoral algérien en un véritable bouillon de culture, vecteur d'un grand nombre de pathologies désignées pudiquement sous le nom de Maladies à transmission hydrique (MTH). Depuis de très nombreuses années, particulièrement durant les périodes de grosse chaleur, et en plus de foyers plus ou moins localisés de typhoïde, de diphtérie ou de choléra, des épidémies de gale, de conjonctivite et autres «maladies mystérieuses» refont leur apparition, dégradant un peu plus l'état sanitaire des populations. Les déversements incontrôlés dans le milieu marin, sans traitement préalable, de résidus induits par les activités domestiques et industrielles sont, pour une large part, à l'origine de la survenue de nombreux cas d'épidémies constatés tout le long du littoral mais, aussi, de la disparition progressive de nombreuses espèces de poissons et de crustacées évoluant près des côtes. L'Algérie, pourtant participante active, en juillet 1997, à la Conférence de Barcelone, ne semble pas avoir fait, sérieusement sienne, la Convention du même nom, appelant les pays riverains de la Méditerranée à initier un certain nombre d'actions afin de protéger la mer Méditerranée contre le rejet de polluants et de toutes autres substances nuisibles. Ainsi, la majeure partie des stations d'épuration d'eaux usées, installées près des zones d'activité humaine, à l'intérieur du pays ou à proximité du littoral, sont à l'arrêt, ou n'ont jamais fonctionné. Une enquête diligentée par le ministère en charge de l'environnement, fait ressortir, par ailleurs, que les chutes de rendement agricole atteignent 50% du fait de la pollution des eaux utilisées pour l'irrigation. Parmi les raisons immanquablement évoquées pour tenter de camoufler les situations de crise, la plupart de nos responsables ont pris l'habitude d'utiliser un paravent, ô combien pratique, du volet sécuritaire. Aujourd'hui que la situation sanitaire tend à se dégrader dans des proportions alarmantes, frisant des seuils incontrôlables, l'on assiste, de nouveau, à des déclarations tonitruantes, se voulant tout autant rassurantes, quant à une prise en main «rapide et sérieuse» de la santé du citoyen. Un blabla auquel les Algériens ont fini, par la force des choses, ne plus accorder de crédit. Ceux qui nous gouvernent feignent, dans la perspective de la prochaine échéance électorale, de prendre, enfin, conscience de l'état sanitaire de la population algérienne arrivé à un niveau de dégradation alarmant et qu'il s'avère, désormais, urgent de refonder le système de santé publique. En amont, les responsables de l'hydraulique nous annoncent que les travaux de réalisation ou de remise en état des stations d'épuration des eaux usées, vecteurs de la plupart des épidémies signalées, ici et là, vont démarrer incessamment. On se remet à souligner sans, bien entendu, omettre de dénoncer au passage, le manque de civisme réel il est vrai, des citoyens, la nécessité de lancer des actions de prévention et d'assurer une meilleure prise en charge des questions liées au ramassage et au traitement des déchets domestiques. Encore des promesses? Attendons pour voir. En attendant la première action d'envergure, réalisée dans l'urgence, sur fonds propre de la wilaya d'Alger, et destinée à dépolluer le littoral algérois, va concerner une zone comprise entre Palm Beach et Les Dunes, à proximité immédiate des plages, habituellement fréquentées par les membres de la nomenklatura et de leurs proches. Mais qui a parlé de coïncidence?