Sortis par la petite porte, ils veulent revenir par la fenêtre Les Algériens qui ont payé un lourd tribut du fait de cette violence, accepteront-ils de revoir encore les mêmes figures qui les ont entraînés dans le précipice? La rentrée sociale de 2011 s'effectuera sur les chapeaux de roues tant les débats politiques qui marqueront ce rendez-vous seront déterminants pour l'avenir du pays. Il s'agit de la nouvelle loi sur les partis politiques. Cette loi dont le contenu n'a pas été révélé suppose néanmoins, un remodelage total du paysage politique national. Etant une force incontestable, les islamistes espèrent avoir leur parti à la faveur de cette loi qui leur ouvre ainsi une brèche. C'est ce qui a extrait de sa torpeur cette mouvance dans l'ombre depuis plus de dix ans. Les conflits sociaux, les revendications portant augmentation des salaires, les grèves et autres débrayages annoncés pour ce mois de septembre, ne sont en fait que la partie visible de l'iceberg. «Le véritable dilemme pour nous est de savoir s'il faut donner des agréments à des partis islamistes ou non», confie un haut responsable de l'Etat s'exprimant sous l'anonymat. «Le danger est de voir le retour du FIS dissous sous une autre appellation» craint le même responsable ajoutant que le débat «en haut lieu» constitue un véritable casse-tête. «Il n' y a aucune tendance lourde qui s'est dégagée jusque-là, mais il n y a pas de niet catégorique à ce que des partis islamistes soient agréés.» Les débats s'annoncent très rudes au sein de l'Assemblée nationale qui reprendra ses travaux au début du mois de septembre. Il faut s'attendre à des batailles féroces entre les partisans du retour des islamistes et les contre. C'est ce qui explique cette agitation des islamistes qui a commencé il y a presque quatre mois, c'est-à-dire quelques semaines après la série de réformes annoncées par le Président Bouteflika dans son discours du 15 avril dernier. Au summum des révoltes arabes, le débat sur l'éventuelle libération de islamistes emprisonnés en Algérie depuis 1992, a fait incursion avec fracas sur la scène politique nationale. Tout a commencé par une déclaration de l'un des fondateurs du FIS dissous, El Hachemi Sahnouni, qui a soutenu en mai dernier que le Président Bouteflika «signerait un décret présidentiel visant la libération des prisonniers islamistes, notamment ceux qui ont été arrêtés en 1991 et 1992, sauf ceux qui sont impliqués dans les attentats à la bombe et les viols». Cette déclaration a soulevé un tollé. Le 29 mai, le Premier ministre Ahmed Ouyahia a démenti officiellement cette information. Deux mois plus tard, c'est un autre leader islamiste qui émerge après une longue hibernation. Le 30 juillet dernier, à Alger, Abdallah Djaballah, ancien responsable et fondateur des partis Ennahda et El Islah, a annoncé devant 1500 participants la création d'une nouvelle formation politique dénommée le «Front de la justice et du développement» (FJD). Deux semaines plus tard, l'ex-émir de la Ligue islamique pour la daâwa (prédication) et le djihad (Lidd), Ali Benhadjar, jette un pavé dans la mare et annonce sur le journal oneline Tousurlagerie (TSA) que «des préparatifs sont en cours avec d'anciens responsables de l'ex-FIS pour la tenue d'un congrès constitutif pour le retour du parti dissous». Il a également confirmé l'existence de contacts avec les ex-numéros 1 et 2 du FIS dissous. «Il y a des contacts avec les cheikhs Abassi Madani et Ali Benhadj avec qui nous entretenons de bonnes relations.» Les masques sont tombés. La rumeur diffusée à doses homéopathiques vient d'être confirmée et le retour du FIS dissous est publiquement évoqué. La mouvance démocratique a-t-elle renoncé au combat politique ou est-elle simplement tétanisée par ce qu'elle vient d'entendre? Si on ne connaît pas l'impact et l'ancrage réel de l'islamisme radical au sein de la société, on ne peut pas non plus deviner la réaction d'une société qui a subi dans sa chair les affres du terrorisme islamiste. Les Algériens qui ont payé un lourd tribut du fait de cette violence terroriste, accepteront-ils de voir discourir les mêmes figures qui les ont entraînés dans le précipice?