Des paires de chaussures sont cédées à plus d'un million de centimes. Seuls les enfants des milliardaires des quartiers huppés comme Saint-Hubert, Canastel et les Palmiers peuvent s'offrir les habits de luxe le jour de l'Aïd. Par contre, tous les autres, les démunis, se rabattent, comme de coutume, sur la friperie pouilleuse importée, en grandes quantités, d'Europe et ce, au moment même où le gouvernement algérien vient d'annoncer que l'Algérie ne sera pas concernée par la crise financière qui sévit un peu partout dans le monde. Une question revient comme un leitmotiv dans toutes les bouches: à combien revient l'habillement complet d'un seul enfant? Les parents détiennent la réponse. Après la hausse des prix des fruits et légumes qui a marqué le début du mois de Ramadhan, une autre augmentation a été décidée quelques jours avant le début de septembre. Elle annonce l'approche de l'Aïd. La fièvre des prix s'est installée définitivement. Le petit salarié est «dépouillé» aussi bien par sa progéniture capricieuse que par le commerçant profitant de la moindre occasion pour s'enrichir.Dès l'entame de la deuxième semaine du Ramadhan, les va-et-vient n'ont pas cessé, les marchés d'habillement et les somptueux magasins des rues Larbi-Ben Mhidi, Khemisti et Choupot sont de jour comme de nuit, pris d'assaut. Les commerçants ne sont pas vus d'un bon oeil par des visiteurs qui cherchent des produits neufs à des prix abordables. Les enfants accompagnés par leurs parents s'entêtent pour acheter, coûte que coûte, des produits «made in», question de rivaliser, ne serait-ce une journée, avec les autres bambins. Une question reste posée: les produits tant recherchés sont-ils à la portée de tous les salariés, surtout ceux ayant une progéniture nombreuse? «Acheter un produit de marque est un rêve irréalisable», a indiqué Mohamed L., rencontré au marché. Le constat est à relever de visu. Le prix d'un ensemble pour filles varie entre 3500 et 4500 DA tandis que celui d'un jean de marque est fixé à 3000 dinars et plus dans certains magasins de Choupot. Ajouter une paire de chaussures de 10.000 dinars, c'est la mensualité qui part en fumée! «Les prix sont inabordables», a déploré un autre père de famille. Il n'a pas hésité à pointer du doigt la hausse des prix dans le commerce de détail. Un commerçant exerçant dans le centre-ville a vivement répliqué. D'un ton sec, il a préconisé de s'approvisionner dans les marchés de Mdina Djedida et celui d'El Hamri. A Mdina Djedida, tous les articles sont disponibles. Des robes, des chaussures, des chemises, des jeans, des pulls, des ensembles sont étalés à longueur de journée. Ils arrivent en grandes quantités et la provenance est connue de tous: la Chine et quelques pays asiatiques. La qualité est douteuse et les prix sont accessibles. Dans le marché de la fripe d'El Hamri, les tarifs sont bas. El Hamri est pris d'assaut par des milliers de familles. A certaines occasions on peut tomber sur une bonne affaire, un article neuf bradé. «Nous sommes incapables d'affronter les prix fous appliqués par les commerces d'habillement», a indiqué un autre citoyen.Un vrai casse-tête chinois ces dernières années pour les parents. La fête de l'Aïd est à quelques encablures, plusieurs centaines de familles ne savent plus à quel saint se vouer. Heureusement que les banques viennent à la rescousse. Aux fins de subvenir aux multiples besoins exigés par la conjonction de plusieurs évènements, certaines familles n'hésitent pas à hypothéquer, auprès des banquiers, leurs bijoux, contre quelques milliers de dinars. En attendant le jour J, des centaines de familles essaient de se divertir suivant les soirées ramadhanesques animées par l'APC d'Oran, le temps d'oublier la triste réalité qui les poursuit comme une malédiction: la faiblesse du pouvoir d'achat et la hausse tous azimuts des prix.