Les Américains accusent de duplicité Islamabad, qui refuse, selon eux, malgré les milliards de dollars d'aide américaine, de «nettoyer» les taliban pakistanais, alliés à Al Qaîda Washington, qui accuse son allié pakistanais de faire double jeu avec les taliban présents sur son territoire, a haussé le ton après les attaques spectaculaires menées cette semaine à Kaboul, affirmant détenir les «preuves» de l'implication d'Islamabad dans l'insurrection afghane. Dans un entretien accordé samedi soir à Radio Pakistan, l'ambassadeur américain au Pakistan Cameron Munter a évoqué l'existence de «preuves» des liens entre «le gouvernement pakistanais» et le réseau Haqqani soupçonné d'avoir coordonné les attaques lancées contre le QG de l'Otan et l'ambassade américaine à Kaboul. «Les attaques qui ont eu lieu il y a quelques jours à Kaboul sont l'oeuvre du réseau Haqqani (...). Il y a des preuves de liens entre le réseau Haqqani et le gouvernement pakistanais. Cela doit cesser», a déclaré Cameron Munter. Le réseau Haqqani tire son nom de Jalaluddin Haqqani, un commandant de moudjahidine historique de la lutte contre l'invasion soviétique dans les années 1980, qui se rallia ensuite au régime taliban. Ce réseau est soupçonné d'avoir organisé plusieurs attaques spectaculaires ces dernières années contre les forces américaines en Afghanistan en utilisant les zones tribales du Waziristan, dans le nord-ouest du Pakistan, comme base arrière. Le secrétaire américain à la Défense, Leon Panetta, a pressé mercredi le Pakistan d'agir contre ce réseau. «Nous n'allons pas laisser ce type d'attaques se reproduire», a-t-il prévenu. Le ministère afghan de l'Intérieur a enfoncé le clou hier en estimant que «le terrorisme devait être combattu dans ses bases arrières, à ses racines de l'autre côté de la frontière». «Peut-être que les Américains sont en train également de s'en rendre compte (...). Nous pensons que malgré toute l'aide et les efforts diplomatiques pour entraîner le Pakistan dans la guerre contre le terrorisme, les résultats escomptés se font toujours attendre», a déclaré le porte-parole du ministère, Siddiq Siddiqui. Ces commentaires surviennent à un moment délicat des relations entre les Etats-Unis et le Pakistan, alliés dans la lutte contre le terrorisme mais qui se vouent une méfiance réciproque et tenace. Les Américains accusent de duplicité Islamabad, qui refuse, selon eux, malgré les milliards de dollars d'aide américaine, de «nettoyer» les taliban pakistanais, alliés à Al Qaîda, principaux responsables d'une vague très meurtrière d'attentats - essentiellement suicide - qui a fait plus de 4.650 morts dans tout le pays ces quatre dernières années. De son côté, Islamabad reproche à Washington de ne pas l'avoir informé à l'avance du raid lancé le 2 mai contre Oussama Ben Laden à Abbottabad, une ville-garnison pakistanaise où il se terrait, à deux heures au nord d'Islamabad. Pour tenter d'apaiser ces tensions, les deux plus hauts gradés des armées américaine et pakistanaise, le chef d'état-major interarmées américain, l'amiral Mike Mullen, et son homologue pakistanais, le général Ashfaq Kayani, se sont entretenus vendredi à Séville (Espagne) en marge d'une conférence de l'Otan. Les deux hommes, qui se rencontraient pour la première fois depuis la mort de Ben Laden, «sont tombés d'accord sur le fait que les relations entre les deux pays demeurent vitales pour la région» et ont reconnu «des gestes positifs» des deux côtés. Ce faisant, les violences se poursuivent au Pakistan où les taliban» ont attaqué hier au lance-roquette un poste de police de Bara, dans le district de Khyber, près de la frontière afghane. Le bilan fait état de quinze morts. Par ailleurs un drone américain s'est écrasé hier dans le sud du Waziristan en raison d'un «problème technique», a indiqué un responsable sécuritaire à Peshawar. Cette région est considérée par Washington comme le principal sanctuaire d'Al Qaîda dans le monde.