L'ex-dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev a mis en garde hier Vladimir Poutine contre le risque d'une stagnation et l' «impasse» du pouvoir personnel, après l'annonce samedi du retour au Kremlin de l'actuel Premier ministre et homme fort du pays. «Si le futur président ne procède à aucun changement et pense uniquement à conserver le pouvoir (...), ce sera son erreur», a averti M. Gorbatchev dans les pages du journal d'opposition Novaïa Gazeta, après l'annonce samedi de la candidature de Vladimir Poutine à la présidentielle de mars. La presse, comme les observateurs, ont considéré cette annonce comme la quasi-certitude d'un retour au pouvoir jusqu'en 2024 (deux mandats de six ans) de M. Poutine, actuel Premier ministre et véritable homme fort du pays. «Nous sommes habitués à ce que tout soit décidé à l'avance, mais nous avons tout de même l'ambition de la démocratie...», a ajouté M. Gorbatchev, initiateur dans les années 1980 de la perestroïka qui leva la chape de plomb qui pesait sur la société soviétique. Novaïa Gazeta, dont M. Gorbatchev est actionnaire, publiait d'ailleurs à sa une des caricatures représentant «la direction du pays telle qu'elle sera en 2024»: M. Poutine, M. Medvedev et plusieurs autres responsables russes vieillis, avec sur la poitrine des rangées de médailles rappelant les dirigeants de l'époque soviétique. «Il n'y aura aucun progrès s'il n'y a pas de sérieux changements dans l'ensemble du système, (...) le futur président devrait y réfléchir très sérieusement», a encore déclaré le prix Nobel de la Paix, rappelant qu'il s'était déjà exprimé sur «l'impasse» de la situation politique en Russie. M. Gorbatchev avait dénoncé en août les «tendances autoritaires» de M. Poutine et critiqué son parti, Russie unie, ultra-majoritaire à la chambre basse du Parlement (Douma), estimant qu'il ressemblait à ce qu'était le Parti communiste à l'époque soviétique. Le Premier ministre Vladimir Poutine a annoncé samedi son intention de redevenir président après le scrutin de mars 2012, une élection qu'il est quasi assuré de remporter en l'absence de réelle opposition, laminée durant ses deux mandats au Kremlin (2000-2008). Il a précisé qu'il confierait la direction du gouvernement à M. Medvedev, qu'il avait désigné en 2008 pour lui succéder au Kremlin, faute de pouvoir se représenter, selon la Constitution. La presse nationale russe, dont certains titres gardent une liberté de ton sans commune mesure avec la ligne éditoriale des principales chaînes de télévision, relevait elle aussi hier que l'annonce du retour de M. Poutine au Kremlin illustrait la domination de l'ex-agent du KGB dans le pays, avec à la clé le risque d'une stagnation. «Poutine pour toujours», titrait le quotidien populaire Moskovski Komsomolets: «L'histoire s'est semble-t-il arrêtée dans notre pays, Poutine est notre passé, notre présent et notre futur», ajoutait le journal.