François Hollande et Martine Aubry, arrivés en tête de la primaire socialiste en France, se disputeront dimanche un second tour serré, avec la nécessité de séduire les électeurs d'Arnaud Montebourg, l'homme le plus à gauche de ce scrutin inédit, chantre de la démondialisation. L'écart plus faible que prévu entre les deux finalistes (38,91% contre 30,47% selon des résultats presque définitifs) rend très ouvert le second tour qui désignera le candidat socialiste à la présidentielle du printemps prochain face vraisemblablement à Nicolas Sarkozy. Bien qu'arrivé en tête lors de ce premier tour qui a réussi à mobiliser plus de 2,5 millions d'électeurs de gauche, François Hollande donne l'impression d'être fragilisé par cette avance moins confortable que ce que les sondages ne lui prédisaient. L'ex-patron du PS, qui a fait campagne sur le thème du rassemblement en se disant le plus apte à battre Nicolas Sarkozy, pense toujours gagner le 16 octobre mais «pas avec une marge très grande», a-t-il admis lundi matin. De son côté, la maire de Lille (nord) croit en sa dynamique et entend au second tour incarner «une gauche forte» en opposition à une «gauche molle» qui serait représentée par François Hollande. L'issue incertaine du second tour donne un poids déterminant aux électeurs du troisième homme, Arnaud Montebourg, qui a créé la surprise avec 17,16% des voix. Son discours axé sur la démondialisation, le protectionnisme européen, le contrôle des banques et la rénovation politique a séduit de nombreux électeurs situés à la gauche du Parti socialiste. «Si les deux candidats veulent obtenir un geste de ma part et de celle de mes amis (...) il faudra certainement qu'ils renoncent à un certain nombre des recettes gestionnaires du passé qu'ils ont défendues dans leur campagne», a-t-il prévenu lundi soir sur la chaîne de télévision France 2. M. Montebourg, a indiqué qu'il allait envoyer une «lettre ouverte» aux deux finalistes, qui sont selon lui les deux faces d'une même pièce, et n'a pas exclu de ne pas donner de consignes de vote. A priori, ses électeurs, s'ils retournent aux urnes dimanche, devraient davantage se reporter sur Martine Aubry, à l'identité sociale plus affirmée. «Nous avons des points largement communs et je les reprendrai moi aussi dans le second tour», a déjà répondu Mme Aubry sur la chaîne de télévision TF1 estimant être «bien placée» pour "rassembler toute la gauche et les écologistes». Quelle sera la stratégie de François Hollande qui a voulu lors du premier tour incarner la rigueur de gauche et se placer au-dessus du débat dans une posture déjà présidentielle? J'entends les préoccupations des électeurs d'Arnaud Montebourg, a-t-il déclaré sur la chaîne de télévision France 3. Mais, a-t-il ajouté, je dois non pas changer de ligne, non pas faire une espèce de virevolte, non pas essayer de séduire, ça mérite mieux, la primaire et l'élection présidentielle. Je dois donner une cohérence aux Français». La championne socialiste de 2007 Ségolène Royal, tombée de haut (6,79%) a elle promis de se déterminer d'ici 48 heures après cette amère défaite qui lui a tiré des larmes. Seuls Manuel Valls (5,62%), qui occupait l'aile droite du PS, et Jean-Michel Baylet, président du petit parti des Radicaux de gauche (0,64%) ont appelé à voter pour François Hollande. Les deux finalistes vont débattre mercredi soir à la télévision dans un duel qui risque de se durcir alors que pour l'instant les socialistes ont réussi à éviter le piège de la division, comme l'espérait la droite. La plupart des éditorialistes de la presse quotidienne pronostiquaient d'ailleurs «un second tour de tous les dangers» qui risquait de ne pas dégager un vainqueur net et de compromettre la dynamique créée par la mobilisation massive de la gauche dans les urnes. Car, du climat de l'entre deux tours, dépendra aussi le succès de la primaire et le rassemblement autour du vainqueur, prévu lors d'une convention d'investiture le 22 octobre.