La question récurrente qui se pose aujourd'hui est : Israël est-il intéressé par la paix ? A voir les obstacles qui s'accumulent sur le chemin de la paix, sciemment et consciemment dressés par Tel-Aviv, on est plutôt enclin à répondre par la négative. Et le «mur de l'Apartheid», comme le qualifient à juste raison les Palestiniens, -dont le premier tronçon de 140 kilomètres vient d'être achevé - est là pour signifier le peu de cas qu'Israël fait de la «feuille de route», le plan de paix international, et des efforts consentis par la communauté internationale pour trouver un terrain d'entente entre les deux parties. Toutefois, lorsque l'un des belligérants, Israël en l'occurrence, prétend être juge et partie et veut imposer sa seule vision de la «sécurité et de la paix», qui va à l'encontre même de l'objectif recherché, le moins est de conclure que les Israéliens ne sont en réalité intéressés que par une paix imposée aux Palestiniens. Ce qui équivaut en vérité à leur reddition pure et simple. La construction du «mur» loin de sécuriser Israël ne fait que compliquer la donne proche-orientale. Même le président américain, George W.Bush, est conscient que cette nouvelle difficulté constitue une véritable entrave pour la mise en oeuvre le la «feuille de route». C'est dans ce contexte que le président Bush a déclaré vendredi dernier, que la construction de cette ligne compliquait la possibilité de créer un Etat palestinien. Il dira à ce propos : «J'ai dit que la clôture est un problème car elle fait des méandres en Cisjordanie, ce qui rend très compliqué la tâche de développer dans le temps un Etat contigu. Nous en avons donc parlé et parlons aux Israéliens de la clôture.» De toute évidence, c'est le dessein des responsables israéliens de faire en sorte qu'un Etat palestinien, dans les conditions que veut lui imposer Israël, soit peu crédible et également peu viable. Même les Américains, peu suspects de harcèlement envers Israël, admettent ouvertement que le «mur» n'est pas du tout une bonne idée et risque en fait d'annuler tous les acquis de ces derniers mois afin de solutionner le contentieux israélo-arabe. La clôture «de sécurité» ou de «séparation», pour les Israéliens et «mur de l'Apartheid» pour les Palestiniens, s'enfonce loin sur des centaines de mètres, voire des dizaines de kilomètres à l'intérieur de la Cisjordanie, morcelant un pays déjà défiguré par les quelque 200 colonies qui ont détruit la cohérence physique et géographique des territoires palestiniens occupés. L'ouvrage, dont 140 km viennent d'être achevés, est fait d'un mur pouvant atteindre «des dizaines de mètres de large, dont une clôture électronique, des pistes de patrouille, des fossés antichars, et par endroits, un muraille de béton de huit mètres de haut», tel que le décrit la presse israélienne. Si, à la limite, on s'était borné à faire suivre à «clôture» la «ligne verte» frontière entre Israël et les territoires palestiniens telle qu'elle figurait avant la guerre de juin 1967, cela aurait été un demi-mal. Mais en décidant de faire pénétrer le «mur» jusqu'à plus de 20 km à l'intérieur de la Cisjordanie, il était évident que Sharon et son staff gouvernemental n'étaient nullement déterminés par l'instauration d'une paix équitable, et la sécurité pour tous les peuples de la région, mais plus par la volonté d'empêcher, par tous les moyens, l'érection d'un Etat palestinien indépendant. Les Israéliens doivent bien comprendre que la paix s'instaure entre adversaires, elle ne peut en aucune manière être imposée, car alors ce ne serait plus la paix, mais autre chose qui n'a rien avoir avec la paix et la sécurité que les Israéliens prétendent rechercher.