Le soutien actif des ârchs aux journaux suspendus se traduira, dès aujourd'hui, par le blocage de la plus importante Route nationale du pays. Le mouvement des ârchs, depuis la rencontre d'Ifri Ouzellaguen, a décidé d'entreprendre une série d'actions de soutien aux journaux suspendus, dont le nôtre. La gravité de l'acte liberticide commis par le pouvoir n'a d'égale que l'importance et l'envergure de l'action décidée par le mouvement citoyen. Dès aujourd'hui, en effet, la RN5, qui relie Alger à Constantine, en passant par la plupart des villes importantes du pays, sera fermée à la circulation sur tout l'axe Bouira-Tizi Ouzou-Béjaïa. L'importance de cette action se mesure à l'aune du nombre important de véhicules qui empruntent chaque jour cette route hautement stratégique pour l'économie nationale. C'est le premier mouvement important que la population exprime ouvertement depuis la suspension, dimanche soir, de six parmi les plus importants titres de la presse nationale. Les observateurs ont été unanimes à constater qu'il était tout à fait normal que la première manifestation de grande envergure, après celle de la Maison de la presse où le FLN, enfin devenu autonome, avait fait un tabac, se déroule au niveau du chantre de la liberté et des droits de l'Homme, la Kabylie. Le blocage, précisent ses initiateurs, «durera le temps qu'il faudra, c'est-à-dire jusqu'à ce que ces mesures arbitraires et illégales de suspension soient enfin levées». Des marches sont également prévues à Tizi Ouzou, Bouira et Béjaïa sur appel lancé par les bureaux locaux des six titres suspendus. Cet appel, soutenu par le mouvement des ârchs, a été largement relayé par les médias qui n'ont pas été touchés par ces mesures liberticides. Les ârchs, loin de s'arrêter en si bon chemin, prévoient aussi d'empêcher la presse d'entrer dans la région de Kabylie tant que des journaux seront illégalement et abusivement suspendus. La levée de cette mesure, en outre, a été officiellement incluse dans les préalables au dialogue lancé par le pouvoir en faveur du mouvement des ârchs. Le pouvoir, avec à sa tête Bouteflika, fait du règlement imminent de la crise de Kabylie une priorité absolue. Sans quoi, est-il besoin de le souligner, la future présidentielle se déroulera dans des conditions pires que celles qui avaient caractérisé le vote de 1999. Le pouvoir, qui avait bien calculé son «coup», en ordonnant ces suspensions en plein mois d'août lorsque tout le monde fait relâche, est bel et bien en train d'être rattrapé par le temps. Une véritable course contre la montre est ainsi engagée. Il ne fait pas de doute qu'à la rentrée sociale, la protesta va s'étendre telle une traînée de poudre au restant du territoire national, sous l'impulsion de la classe politique, des syndicats ouvriers et patronaux et des organisations professionnelles et autres. Lors de sa visite de soutien à notre journal, le délégué charismatique de la ville des Genêts, Belaïd Abrika, avait bien pris le soin de signaler que le soutien des ârchs ne se bornerait pas à de simples mots, mais qu'il consisterait en des actions concrètes en faveur des six titres de presse suspendus. Nul doute que cette entrée en la matière de la part du mouvement des ârchs, n'est qu'un avant-goût de ce que sera la rentrée sociale, porteuse de grands risques d'une grève nationale et illimitée. Même la Centrale Ugta, qui a déjà eu à condamner sévèrement cette mesure de suspension, étudierait actuellement «l'éventualité de suspendre la tenue de la bipartite et de la tripartite, de concert avec le patronat algérien». Le recours à un débrayage, également motivé par la dégradation de la situation sociale et les mesures contraires aux intérêts du pays que signe le Président sous forme d'ordonnance durant l'intersession, n'est pas non plus écarté. En somme, cette suspension est assimilée par beaucoup à la goutte d'eau venue faire déborder un vase de mécontentements qui n'a jamais été aussi plein. Sale temps pour l'Exécutif en place...