Le rappel à l'ordre du gourou de la jeunesse urbaine pauvre tranche avec la mission dont a été investi Abassi Madani. Le directeur général de la Sûreté nationale, M. Ali Tounsi, a affirmé, hier, que l'interpellation récente de Ali Benhadj par la police est intervenue après qu'«il ait transgressé des interdictions dictées par loi». «Ces interdictions ont été notifiées par la justice à Ali Benhadj après avoir purgé sa peine», a rappelé M.Tounsi lors d'un point de presse tenu en marge de la réunion africaine sur le terrorisme et le crime organisé. M.Tounsi, qui a affirmé que Ali Benhadj «a défié la loi», a rappelé que la police est «auxiliaire de la justice». Le rappel à l'ordre du gourou de la jeunesse urbaine pauvre tranche avec la «mission» dont a été investi Abassi Madani. Parti en Malaisie, avec la bénédiction du Président de la République, «pour des motifs humanitaires et médicaux», précise une source proche de la présidence, Abassi Madani, n°1 et porte-parole du FIS-dissous, a fait des déclarations très élogieuses à l'endroit de Abdelaziz Bouteflika, au point que tout le monde, aujourd'hui à Alger, pense que celui qui a été privé de ses droits civiques est devenu l'allié du Président dans une espèce d'esquisse de nouvel ordre politique qui ne nous est pas encore dévoilé. Mieux encore, l'initiative de paix lancée à partir de Kuala Lampur par Madani semble très proche de celle initiée par Abdelaziz Bouteflika, et pourrait atterrir à Alger avant le début «officiel» de la campagne pour l'élection présidentielle et pousser l'influente base électorale islamiste à appuyer - encore une fois - la candidature de l'actuel Président pour un second mandat. En fait, le jeu ambigu pouvoir-islamistes reste à ce point opaque pour appeler encore et encore à des grilles de lecture diverses. Lâché par la plupart de ses soutiens, Bouteflika a plus que jamais besoin d'un coup de main de la part des leaders islamistes et ce n'est pas une interpellation de Benhadj, opérée de manière très «soft», qui va changer quoi que ce soit aux enjeux politiques, qui dépassent même la vision étriquée de Benhadj. La mise au point de Ali Tounsi est venue renforcer l'idée d'une obligation de respect des lois de la République par les leaders islamistes, mais elle semble s'imbriquer dans un ensemble qui dépasse de loin cette interprétation de conjoncture.