ne déclaration a été faite hier par le ministre sur la chaîne de télévision Canal+ après avoir été sollicité à s'expliquer sur ses propos concernant les civilisations. Le ministre français de l'Intérieur a tenté de se rattraper hier. «Mon propos de bon sens et d'évidence ne visait aucune culture en particulier, ni nos concitoyens de confession musulmane qui respectent et adhèrent pleinement aux valeurs de la République, et dont la République respecte et protège les croyances» a-t-il assuré mardi dans un courrier adressé au Conseil français du culte musulman (Cfcm). Une mise au point tardive? Le mal semble avoir été fait. Claude Guéant est dans la tourmente. Nicolas Sarkozy vole à son secours. «Le ministre de l'Intérieur a dit qu'une civilisation, un régime, une société qui n'accordaient pas la même place et les mêmes droits à des hommes et à des femmes, ça n'avait pas la même valeur» explique le chef de l'Etat français dans un entretien enregistré qui sera diffusé lundi soir sur la chaîne de télévision publique France 2. Quels sont les propos tenus par Claude Guéant? «Toutes les civilisations ne se valent pas», a déclaré le 4 février l'ex-secrétaire général de l'Elysée. Il s'est ensuivi des réactions en chaîne. Propos xénophobes, racistes...? Dérapage verbal, provocation...? Celui qui a sans doute le mieux qualifié la sortie médiatique controversée du successeur de Brice Hortefeux est bien Jean-Pierre Raffarin. «Guéant est meilleur ministre qu'ethnologue», a souligné l'ex-Premier ministre de Jacques Chirac. Un choc dans la campagne présidentielle! Se jouera-t-elle sur le dos des musulmans de France? La civilisation musulmane était-elle particulièrement ciblée? Le Conseil musulman de France a voulu en avoir le coeur net à travers une lettre destinée au premier policier de France dans laquelle il lui a demandé des explications. «Nombre de nos concitoyens de confession musulmane se sont sentis visés par ces déclarations et nous l'ont fait savoir», a souligné Mohammed Moussaoui, son président, au ministre chargé des Cultes, pour légitimer sa requête, rassurer les fidèles et éviter de nouveaux «quiproquos» qui stigmatiseraient, encore une fois l'Islam. Mal lui en a pris. Le patron de la Place Beauvau a enfoncé le clou tout en entretenant une espèce de confusion entre «civilisation» et «religion» qui lui permettrait une toute petite marge de manoeuvre. Ménager la chèvre et le chou en quelque sorte. 4 millions de voix de musulmans sont en jeu. Sarkozy en sérieuse difficulté dans les sondages et donné battu par François Hollande, le candidat socialiste, les courtise. Son fidèle lieutenant les lui a-t-il fait perdre définitivement? Il semblerait que oui, après la dernière sortie médiatique de l'ex-secrétaire général de l'Elysée. Le ministre de l'Intérieur qui n'a pas nié l'existence de la correspondance que lui a expédié le Cfcm a répondu ainsi aux inquiétudes de son président: «Le président du Cfcm me demande de lui donner des assurances sur le fait que mes propos ne visent pas la civilisation musulmane. Je lui réponds que pour moi, ce qui est en cause, c'est la religion musulmane...», a affirmé, le 7 février Claude Guéant sur la chaîne de télévision Canal+. «Les musulmans de France représentent la deuxième religion dans notre pays (...) et la République protège leurs croyances et favorise la pratique de leur culte (...) Ce que j'ai dénoncé dans mes propos, c'est le relativisme du Parti socialiste», a-t-il ajouté. Des propos qui ajoutent à la confusion. Ils mettent en première ligne la religion musulmane et font les yeux doux à un électorat extrémiste, très sensible aux thèses racistes et xénophobes que dispute, âprement, le clan présidentiel à Marine Le Pen, la présidente du Front national. Le voyage prévu dans quelques jours, en Martinique, de celui qui braconne sur ses terres s'annonce comme infernal. Les propos du ministre français de l'Intérieur ont suscité des réactions hostiles et violentes, empreintes d'indignation dans ce territoire français d'outre-mer. «Votre venue en Martinique dans les jours qui viennent m'obligent à vous rappeler que cette terre a vu naître Aimé Césaire, Frantz Fanon, Edouard Glissant...elle a été aimée par des hommes aussi admirables que furent Victor Schoelcher, André Breton, Léopold Sédar Senghor et Claude Lévi-Strauss», peut-on lire dans une lettre ouverte à Claude Guéant écrite par le député et président de la Région Martinique Serge Letchimy. «Ce serait donc, une injure à leur mémoire, à leur pensée, à leurs actions que de vous laisser une seule minute imaginer que vous serez le bienvenu ici», lui a signifié l'élu du palais Bourbon.