Ouvert samedi par la réunion de la commission d'experts, les travaux du sommet de l'OCI se sont poursuivis hier. Jeudi et vendredi, se retrouvent à Putrajaya, nouvelle capitale administrative de la Malaisie, les 57 chefs d'Etat et de gouvernement membres de l'Organisation de la conférence islamique (OCI). Pour son dixième sommet, l'Organisation de la conférence islamique a placé ses travaux sous le signe du «dialogue des civilisations» avec comme fond le terrorisme et la globalisation. Hier et aujourd'hui, la commission ministérielle des affaires étrangères devait finaliser les dossiers, préparés par la commission d'experts, laquelle s'est réunie les 11 et 12 octobre. Leurs conclusions seront soumises au sommet pour approbation et adoption. Cette rencontre triennale des responsables des pays musulmans tombe en pleine période de turbulences dans nombre de pays membres de l'OCI et singulièrement en Irak, dans les territoires palestiniens occupés et en Afghanistan, en sus de situations précaires dans le monde musulman avec les interminables guerres civiles en Somalie et au Soudan, la guérilla aux Philippines, qui comptent une forte majorité musulmane, l'instabilité aux Comores. Toutefois, ces guerres et cette instabilité chronique du monde musulman sont quelque peu éclipsées par les développements induits par les événements ayant marqué le monde depuis le 9e Sommet de l'OCI au Qatar. En effet, depuis cette époque, beaucoup de choses ont bouleversé la donne géostratégique mondiale, avec comme point d'orgue l'attaque du 11 septembre 2001 contre le World Trade Center de New York et le Pentagone à Washington. Les interventions musclées des Etats-Unis en Afghanistan avec comme résultat la chute des taliban, la guerre déclenchée contre le régime baassiste irakien, avec pour effet la chute de Bagdad et de Saddam Hussein, sont parmi les événements qui ont fait que, si le monde musulman fait l'actualité planétaire, en revanche ses dirigeants sont totalement en retrait par rapport à des situations et des évolutions qui concernent les musulmans au premier chef. Or, le monde musulman s'est illustré ces trois dernières années par un silence qui confine à l'absence d'intérêts pour ce qui relève en priorité de sa sphère politique et géostratégique. Cet attentisme du monde musulman est quelque peu accrédité par les dénégations du coordinateur du secrétariat de la présidence qatariote de l'OCI, Seïf Moqaddam Aboul Aïman, qui déclarait en début de semaine à Doha: «Le Qatar, qui assurait la présidence en exercice de l'OCI, a déployé tous les efforts possibles pour assurer un seuil minimum de solidarité islamique.» Certes, mais il reste que l'OCI a très peu fait entendre sa voix au moment où le peuple palestinien subit les pire s de la part de l'armée israélienne d'occupation. De fait au moment où les experts de l'OCI se préparaient à se réunir à Putrajaya, l'aviation israélienne franchissait un nouveau palier dans l'escalade en bombardant des camps palestiniens en Syrie, agressant ainsi directement un pays membre de l'OCI. D'ailleurs, le sommet de l'OCI compte condamner «fermement» cette agression d'Israël contre la Syrie, condamnation qui demeurera plus morale qu'effectivement efficace. La situation est quelque peu la même pour l'Irak occupé par la coalition américano-britannique, sur laquelle, à l'évidence, le monde musulman ne dispose d'aucun répondant. Aussi, la profession de foi du secrétaire général de l'OCI, Abdelouahed Belkeziz, appelant samedi à «l'expulsion des forces étrangères d'Irak» à défaut d'être prise au sérieux fait sourire. D'ailleurs, le débat sur l'Irak risque d'être houleux après le feu vert donné par le parlement turc à un déploiement des forces turques dans le nord de l'Irak. Déploiement catégoriquement rejeté par le gouvernement transitoire irakien et singulièrement par l'ensemble des partis kurdes. De fait, la prise de bec entre le représentant du gouvernement provisoire irakien, le ministre des Affaires étrangères, Riyadh Al-Fadhili, et son homologue turc, Tahsin Burcuoglu, donne le ton à ce dixième rendez-vous de l'OCI. Ainsi, à l'Irakien qui plaide pour que la Turquie s'en tienne aux «relations commerciales et d'échanges très importants (avec la Turquie), c'est pourquoi nous voudrions nous en tenir à ces relations et ne pas avoir de troupes turques à l'intérieur de l'Irak», le Turc répliquera que les «soldats turcs seraient (en Irak) pour aider la population et ne seront pas là au titre d'occupation». Toutefois, M.Burcuoglu finira par faire remarquer qu'en «Irak, il y a une autorité et c'est l'autorité américaine». Et comme ce sont les Américains qui ont appelé la Turquie à envoyer des renforts militaires...L'Irak a été invité au sommet de l'OCI, après que la Ligue arabe eut accepté, temporairement, en août dernier, la participation du gouvernement transitoire irakien, jusqu'à la formation d'un gouvernement légal dans ce pays. C'est Iyad Allaoui, président en exercice du Conseil de gouvernement transitoire mis en place par les Américains, qui représentera l'Irak. L'Algérie, présente aux travaux du 10e Sommet de l'OCI, sera représentée par le président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika.