C'est un ministre dans ses «petits souliers» qui s'est présenté hier au parlement pour dire qu'il...ne savait pas... N'est-ce pas un comble, se sont indignés des députés, que le premier policier du pays, ancien responsable adjoint des services secrets, indique ne rien savoir de ce qui se tramait contre le FLN, au vu et au su de tous. Cela se passait quelques minutes après la question orale que lui a posée Mourad Boutadjine, député du FLN, et qu'il se soit discrètement éclipsé, suivi par une cohorte de journalistes auxquels il a refusé de dire le moindre mot. La question, posée en des termes très clairs, accuse sept associations caritatives, estudiantines et culturelles d'avoir dévié de leur ligne, et d'avoir servi de paravent aux «anti-Benflis» pour tenir leurs différents regroupements à travers le territoire national, et dont certains s'étaient achevés dans le sang. A cette question très claire, renforcée par l'article 35 de la loi sur les associations, Zerhouni a préféré répondre par des faux-fuyants et des lieux communs qui n'ont convaincu personne. Il avait pourtant plusieurs mois pour préparer sa réponse puisque la question avait été déposée depuis l'été passé. Zerhouni, qui a plaidé en faveur du respect de la législation, et pour que toute déviation devait en effet être sanctionnée, a ajouté ne pas être au courant des informations pourtant tombées dans le domaine public depuis que la presse s'en était fait l'écho à longueur de colonnes. Dans son «droit de réplique», le député FLN a clairement insisté sur le fait que «le ministre de l'Intérieur, qui a délivré l'ensemble des autorisations, connaît mieux que personne l'identité des présents, mais aussi l'objet de ces rencontres». Ce point avait déjà été soulevé dans ces colonnes. Le député ajoute que «le ministère de l'Intérieur aurait quand même dû se poser des questions après que les demandes se sont renouvelées, sous le couvert d'associations différentes, de la part des mêmes personnes, et pour abriter systématiquement des rencontres du FLN parallèle». Vainqueur de ces joutes orales, le député FLN se permettra même une petite leçon ironique à l'adresse du ministre en précisant que «le passé ne compte pas, l'essentiel étant que ce genre de choses ne se renouvelle pas». Déstabilisé par cette cinglante réplique, Zerhouni a préféré ne pas avoir le dernier mot, comme le lui garantit le règlement de l'APN. Il a, au contraire, tenté de s'éclipser discrètement afin de ne pas avoir à répondre aux nombreuses questions gênantes que lui réservait la presse. Mourad Boutadjine, pour sa part, a improvisé une sorte de point de presse dans les couloirs de l'hémicycle. «Je ne m'attendais pas à ce que la réponse du ministre soit aussi faible. Elle constitue pour moi des aveux indirects». Le FLN, à plusieurs reprises, avait accusé le gouvernement, à commencer par Yazid Zerhouni, puis carrément Bouteflika, d'être derrière les attaques menées contre le FLN et, partant, les «réunions parallèles organisées sous le couvert de diverses associations». A ce sujet, Boutadjine parle de sept associations, méritant toutes la dissolution suivant les termes très clairs de l'article 35 relatif au mouvement associatif. Il s'agit de Iqra, Afak, l'UMA (Union médicale algérienne), l'Aren et l'Onea (toutes deux des organisations estudiantines), mais aussi Mach'âl Echahid...Cette victoire parlementaire intervient au lendemain de la déconfiture judiciaire à la suite du verdict courageux rendu par le Conseil d'Etat en faveur de Ali Benflis et de la direction légitime du FLN, issue de son 8e congrès. Les «redresseurs», de leur côté, continuent de s'appesantir sur la décision qualifiée de «douteuse» du Conseil d'Etat. Dans une déclaration rendue publique hier, ils contredisent en substance le contenu de la conférence de presse de dimanche, en indiquant que cette sentence permet aux deux parties en litige de s'estimer gagnantes. Une autre question importante a été posée par le député Islah, Djahid Younsi, à propos de la non-présentation des traités ratifiés par l'Algérie, au nombre de 193, au parlement, tel que stipulé par l'article 131 de la Constitution, et ce depuis 1997. Le ministre chargé des Relations avec le parlement, s'exprimant au nom d'Ouyahia, a indiqué que les deux traités conclus, l'un avec l'UA et l'autre avec la Tunisie, ont été adoptés par le parlement. Ce qui fera dire au député qu'en effet, les pouvoirs publics vont au Parlement lorsque la partie contractante l'exige, comme cela a été le cas pour ces deux accords, alors que ces mêmes pouvoirs publics ignorent les représentants du peuple et la Constitution le reste du temps. Ironie voulue ou pas, l'article évoqué par le député du mouvement de Djaballah prévoit également le passage par le parlement de toute dépense présidentielle non prévue dans le budget de l'Etat. Une question épineuse, qui fait débat en ce moment, et que le tout nouveau ministre a soigneusement évité d'aborder dans sa réponse. D'autres questions, relatives au développement régional, aux risques qui pèsent sur la ville de Constantine, à la distribution de gaz et aux tarifs d'électricité dans les zones du Sud ont également été posées aux ministres de l'Habitat, de l'Energie et des Mines et de la Justice. Zerhouni a également été interpellé par deux députés, du PT et du mouvement Islah, à propos de la prise en charge des sinistrés. Il a, à cette occasion, donné de nombreux chiffres, loin de coller à la réalité du terrain, promettant au passage que pas moins de 6000 familles seront relogées à Alger et Boumerdès avant la fin du mois de Ramadan.