Le président burkinabè Blaise Compaoré, médiateur dans la crise au Mali, reçoit ce week-end classe politique et junte maliennes pour définir la transition après l'investiture jeudi du chef de l'Etat par intérim, au moment où la situation au Nord, sous la loi de groupes armés, est alarmante. M. Compaoré va recevoir les «forces vives » du pays, les politiques et des représentants de la junte installée après le coup d'Etat du 22 mars pour «définir clairement » les modalités de la transition, a annoncé mardi le chef de la diplomatie burkinabè, Djibrill Bassolé, à Ouagadougou. Au lendemain de sa désignation comme chef de l'Etat pour une transition dont la durée reste inconnue, le président de l'Assemblée nationale Dioncounda Traoré a poursuivi ses consultations en vue de la nomination d'un Premier ministre de transition qui sera investi des «pleins pouvoirs ». Le prochain gouvernement d' «union nationale » pourrait compter une vingtaine de membres. Plusieurs membres de l'ex-junte «pourront probablement » y être admis, a jugé M. Bassolé, qui était ces derniers jours à Bamako au nom de M. Compaoré, désigné médiateur par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Pour les formations du front anti-junte, les putschistes emmenés par le capitaine Amadou Sanogo, qui a renversé le 22 mars le président Amadou Toumani Touré (ATT), ne veulent pas entièrement passer la main malgré l'accord de sortie de crise de la semaine dernière. Elles en veulent pour preuve un rassemblement mercredi matin à Bamako: plusieurs centaines de personnes ont marché en soutien à la junte, à l'appel d'un collectif d'organisations «patriotiques ».
«Vive l'armée malienne, à bas les traîtres »
«Vive l'armée malienne, à bas les traîtres », «ATT et ses alliés, adieu », «Non à la démocratie de façade », proclamaient banderoles et pancartes. La Cédéao a obtenu de la junte «un accord de principe » pour la libération de neuf personnalités du régime ATT, dont au moins cinq ministres, arrêtés après le coup d'Etat, une libération qui pourrait intervenir jeudi, selon le ministre ivoirien de l'Intégration africaine Adama Bictogo, membre de l'équipe de médiation. Mais une fois la transition sur les rails, le plus dur restera à faire: depuis le putsch, le nord du pays est passé sous le contrôle de rebelles touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), de groupes islamistes armés, Ansar Dine en particulier, de trafiquants et d'autres groupes criminels. Or, le temps presse car la situation humanitaire devient alarmante. «A moins de progrès rapides dans les prochains jours pour ouvrir un espace humanitaire et permettre des approvisionnements en nourriture et médicaments dans le nord du Mali, il y aura une catastrophe humanitaire majeure qui pourrait se répercuter sur les pays voisins », a averti la Commission européenne. Hôpital et locaux d'ONG pillés et saccagés, stocks de vivres dérobés: le chaos règne ainsi à Gao (nord-est) depuis la prise de la ville. Par ailleurs, Ansar Dine a fait venir de Bamako une délégation de religieux musulmans dans le Nord en vue de la libération de «très nombreux » militaires maliens prisonniers. Le consul algérien à Gao et six de ses collaborateurs sont quant à eux toujours retenus en otages par un groupe dissident d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Toujours à Gao, un journaliste malien a été brutalisé dans la nuit de mardi à mercredi par des rebelles touareg. «Les rebelles du MNLA m'ont dit que je ne devais pas mal parler d'eux, que je dois dire qu'ils font du bon travail ici à Gao », a-t-il dit.