L'ambiguïté de la démarche du président de la République met les islamistes sur leurs gardes. «La ligne politique des leaders du FIS est d'attendre encore que l'opacité se dissipe. Dans l'état actuel des choses, nous ne pouvons faire alliance avec aucun candidat, ni aucun parti. Les choses ne sont pas encore claires, et notre parti garde les mêmes positions : à savoir l'exigence d'une solution globale, qui ne se suffit pas de demi-mesures et qui donne à chacun ses droits. Cette solution globale requiert un minimum de ‘‘sérieux politique'', d'audace dans les décisions et de persévérance dans les démarches et les positions choisies.» C'est ainsi que s'est exprimé, hier, Abdelkader Boukhamkham, un des derniers leaders «légalistes-fondateurs» du parti dissous, à propos de la position officielle de l'ex-FIS sur l'élection présidentielle de 2004. Boukhamkham, qui s'exprimait au nom du FIS, a ajouté que «le parti attend toujours que se concrétise, sur le terrain, et non par les discours, une réconciliation politique nationale qui pourrait, elle seule, constituer une solution à la crise et au blocage actuel». Boukhamkham, qui représente avec Abassi Madani, Ali Benhadj, Ali Djeddi, Kamel Guemazi, Omar Abdelkader et Noureddine Chigara, les sept derniers leaders fondateurs de l'ex-FIS, encore en activité, considère que c'est là la position «officielle» et actuelle du parti, sans aucune surenchère ni compromission. Les élections n'ont rien ramené de bon au pays, au contraire, elles ont anéanti tous les espoirs nés avec l'idée de la trêve et de la concorde. De son côté, l'ancien chef de l'Armée islamique du salut (AIS, bras armé du FIS, auto-dissous en janvier 2000) estime que le «président de la République, en temps que personne, garde les mêmes positions concernant la réconciliation nationale», mais que «sa démarche politique piétine, du fait qu'il s'est entouré d'un clan suspect et douteux, et de collaborateurs qui sont soit d'illustres inconnus en politique, soit des hommes impopulaires et qui ne partagent pas les mêmes positions au sujet de la concorde civile, de la réconciliation nationale, etc.». L'enfant de Kaous, à Jijel, estime que, concernant un appui des islamistes au président de la République, «il est tout à fait prématuré d'en parler, car dans l'état actuel des choses, l'illisibilité politique est telle qu'elle incite à plus de circonspection et plus de retenue». «De toutes façons, ajoute-t-il, d'ici au mois de janvier, les choses s'éclairciront, les vapeurs se dissiperont et alors, on pourra y voir plus clair et donner notre point de vue et notre position en toute confiance». Voilà donc à quoi se résume la position du parti dissous aujourd'hui, et s'il semble que le président de la République a grand besoin d'islamistes dans un contexte politique qui lui devient de plus en plus hostile, il est aussi tout à fait vrai que les islamistes ont aussi grand besoin de lui dans un contexte politique caractérisé par un «tout-sécuritaire» qui fait florès dans les cercles décideurs.