Il faut être dupe pour croire aujourd'hui que les différentes coordinations nées, pour la plupart, dans le feu de l'action en Kabylie sont réellement indépendantes. L'évolution qu'a connue le mouvement citoyen depuis sa naissance à ce jour renseigne amplement sur la mainmise des partis politiques influents dans la région. Ces structures politiques, qui ont été fortement décriées au lendemain des premières émeutes, ont petit à petit refait surface pour se voir aujourd'hui pratiquement aux commandes du mouvement. Si jusqu'à la veille des élections locales, les partis politiques pouvaient se targuer d'être les maîtres à bord à telle enseigne que sans leur consentement, indirectement bien sûr, aucune option ne peut bénéficier de l'unanimité au sein des animateurs, depuis, les choses ont nettement évolué. Le FFS ayant pris ses distances depuis octobre de l'an passé, le RCD s'est retrouvé pratiquement seul pour agir à sa guise avec parfois des pics de tension avec des délégués «indépendants». A l'origine de longs débats, on a retrouvé très souvent les luttes partisanes. A chaque fois qu'une perspective politique se pointe à l'horizon, la guerre que se livreraient, avant les événements, le RCD et le FFS au sein des assemblées élues et sur le terrain, refait surface mais dans les conclaves cette fois-ci. Sur tous les plans, deux lourdes tendances s'affrontent. Selon que l'animateur est d'un bord ou de l'autre, les arguments ne manquent pas pour rejeter ou défendre cette option. Dès qu'un blocage se fait sentir, on évoque comme par enchantement la concertation avec la base. Les débats autour du rejet des élections et la tenue d'une conférence nationale illustrent, en ce sens, cette mainmise des partis politiques sur un mouvement qui ne reste, cependant, pas facile à maîtriser. Au-delà des visées des uns et des autres par les différentes propositions défendues bec et ongles, on a l'impression que les objectifs initiaux du mouvement sont mis de côté. L'influence partisane est très perceptible dans chaque intervention et se trouve être à l'origine des longues palabres houleuses à chaque rencontre de la coordination interwilayas. Derrière le discours des animateurs, se cache mal celui des partis politiques. Le risque de voir le mouvement éclater est toujours présent et pourrait survenir à tout moment, ce qui hantait les esprits des délégués les plus sincères dont la majorité a fini par déserter les rangs. Ce qui se passe présentement n'est franchement pas surprenant pour ceux qui sont très au fait de 1'évolution du mouvement citoyen. Enfin, si cela n'était pas arrivé depuis longtemps, c'est parce que c'est maintenant que le besoin se fait sentir. Il ne faut surtout pas que la présidentielle d'avril 2004 subisse le même sort que celui des locales et des législatives.