L'initiative de l'ancien dirigeant islamiste aura-t-elle un impact positif sur la politique de réconciliation prônée par le président de la République ? Le taux d'audience de la chaîne qatari Al Jazira a dû battre tous les records avec le passage d'Abassi Madani dans la soirée d'hier. En effet, bien qu'interdit de s'exprimer devant les médias depuis sa sortie de prison, Abassi Madani a été l'invité de cette chaîne d'information à laquelle il a accordé un entretien. Abassi Madani n'est pas à sa première entrave de la loi puisqu'il a déjà accordé plusieurs interviews aux médias étrangers et même à un quotidien national, mais dont le numéro a été interdit par ses propres responsables. A l'opposé de son compagnon de route, Ali Benhadj, dont le moindre geste ou parole est surveillé de près par les services de sécurité, Abassi Madani n' a aucun mal à s'exprimer, bien au contraire. D'ailleurs, c'est de Doha que le numéro1 de l'ex-FIS a fait sa première déclaration publique en dépit de toutes les interdictions le frappant. En effet, lors d'une interview accordée à la chaîne qatari Al Jazira, Abassi Madani a appelé les Algériens à surmonter leurs divergences pour faire face à la crise actuelle qui sévit dans le pays. «L'heure d'un règlement du problème algérien a sonné. Et il est grand temps que tous les Algériens, quels que soient leur idéologie, leur statut social et où qu'ils soient, mettent la main dans la main et coopèrent», avait-il déclaré. C'était, selon les observateurs, le premier indice qu'un deal politique a été contracté entre le président de la République et le chef de l'ex-FIS. Le choix de la chaîne qatari Al Jazira n'est pas fortuit du fait que l'ancien dirigeant islamiste est convaincu qu'elle sera un bon tremplin pour défendre son initiative, d'autant plus que ce média est capté en Algérie mais aussi en raison de son impact de par le monde. Une initiative qui vient à un moment délicat de la vie politique nationale. D'ores et déjà, toutes les lectures semblent possibles sur l'impact qu'aura cette intervention sur le moral des 3 millions d'électeurs, convoités par toutes les formations politiques nationales, d'autant que l'ancien leader du FIS dissous semble reprendre de plus belle son activisme, lui qui est parti en Malaisie pour soi-disant des soins. Une initiative qui risque d'avoir un impact positif sur la politique de réconciliation prônée par le président de la République. En outre, Abassi Madani a compris que la force armée de son parti a volé en éclats depuis la reddition de l'AIS et les pertes subies par le GIA tandis que les éléments du Gspc sont sans cesse cernés et traqués par les éléments des forces combinées. Tous ces facteurs ont fait qu'Abassi Madani a opté pour cette offre de paix. Une offre dont la sincérité reste encore à prouver. Mais qu'attend en contrepartie Abassi Madani des pouvoirs publics dans le cas où son appel serait réellement sincère? En faisant l'apologie de la politique de Bouteflika, Abassi Madani s'est-il assuré de recouvrer la légitimité à son parti? A six mois de la présidentielle d'avril 2004, tout reste possible, d'autant que les deux hommes s'appellent «frère» en signe de rapprochement. D'ailleurs, selon certaines sources, c'est le président de la République qui aurait autorisé Abassi Madani à quitter le pays en lui fournissant un passeport en dépit de toutes les interdictions le frappant. Quelle que soit la position soutenue par Abassi Madani, une chose est sûre, c'est qu'elle restera jusqu'à la prochaine échéance électorale pour la magistrature suprême.