Les autorités saoudiennes après des années de laxisme s'engagent à lutter contre le terrorisme. Le bilan de l'attentat à la voiture piégée contre le complexe résidentiel Al-Mouhaya à Riyad dans la nuit de samedi à dimanche, s'est alourdi avec 17 morts et 122 blessés. Les victimes appartiennent à 19 nationalités dont des blessés américains, canadiens et égyptiens. Beaucoup d'observateurs se demandent, l'effet de surprise passé, comment cet attentat a pu être commis, qui plus est dans une zone résidentielle super-sécurisée du fait qu'elle se situe à la proximité du palais royal et du quartier diplomatique. Cela, d'autant plus que les autorités saoudiennes, qui ont annoncé avoir démantelé à la fin du mois dernier un groupe terroriste, s'attendaient plus ou moins à une action dans le genre de celle du samedi soir. Les risques d'attentats étaient encore renforcés par les mises en garde des ambassades américaine et britannique la veille même de l'attentat craignant une éventuelle opération terroriste en Arabie saoudite. Il semble bien que la vigilance des autorités saoudiennes ait été prise en défaut lorsque des terroristes sont parvenus à commettre leurs crimes sans rencontrer une réelle opposition, si ce n'était celle des gardiens requis à la protection du complexe résidentiel, qui ont d'ailleurs relâché leur garde croyant avoir affaire aux forces de sécurité, ce qui permit à la Jeep piégée de pénétrer à l'intérieur de la résidence où le kamikaze s'est fait exploser. De fait l'attentat suicide n'a toujours pas été revendiqué par une quelconque organisation, alors même que les autorités saoudiennes qui, si elles ont pris acte, se sont gardées de prononcer le nom attendu par tous, celui d'Al-Qaîda, présumée être le commanditaire de l'opération du samedi soir. De fait, le ministre saoudien de l'Intérieur, le prince Nayef Ben Abdelaziz, qui assimile les terroristes à des «diables» a affirmé que Riyad s'engageait à combattre fermement le terrorisme, indiquant: «Nous finirons par trouver les responsables. Nous les attraperons, quel que soit le temps que cela prendra» insistant, «Ce sera la mission de tous les enfants de ce pays, notamment les forces de sécurité, jusqu'à ce que nous soyons totalement assurés que notre pays s'est débarrassé de tous les diables et de tous les méchants». Le prince Nayef n'incrimine aucune organisation, ni ne pointe son doigt sur Al-Qaîda, ou Ben Laden, alors que le ministre saoudien de l'Information, Fouad Al-Farsi, déclare que «Ce sont des assassins et des saboteurs, et notre religion musulmane n'a rien à voir avec leurs actes criminels». «Ceux qui ont cherché à commettre des attentats à La Mecque (...) avaient pour objectif de prouver que le royaume n'est pas en mesure d'assurer la sécurité des Lieux Saints», renchérit le quotidien Al-Riyadh zélé et écouté. Il y a une semaine, les autorités sécuritaires saoudiennes avaient annoncé «avoir déjoué un attentat et démantelé un groupe terroriste à La Mecque», où, selon la police, «deux terroristes se sont fait exploser» jeudi. En vérité, à l'approche de l'Aid El Ad'ha, et du Hadj, le grand pèlerinage à La Mecque, les musulmans du monde entier commencent à s'inquiéter sérieusement sur la situation induite en Arabie saoudite par la récente recrudescence des activités terroristes. La communauté internationale choquée par l'attentat de Riyad a unanimement dénoncé le lâche attentat de Riyad. Ainsi, le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, était «horrifié» a dit son porte- parole, lequel a indiqué «Le secrétaire général est horrifié par l'attentat de la nuit dernière dirigé contre un complexe résidentiel de Riyad et condamne cet acte terroriste de la manière la plus ferme». Le président américain, George W.Bush, a quant à lui appelé le prince héritier, Abdallah Ben Abdelaziz, auquel il affirma que les Etats-Unis «étaient aux côtés de l'Arabie saoudite dans sa guerre contre le terrorisme». Ce nouvel attentat qui endeuille l'Arabie saoudite survient au moment où Riyad, après avoir tergiversé, a commencé à prendre au sérieux la lutte anti-terroriste, à la grande satisfaction de Washington en froid avec le royaume wahhabite pour son tiède engagement dans la lutte anti-terroriste d'une part, son laxisme envers les intégristes d'autre part. Cette série d'attentats qui mettent l'Arabie saoudite au premier plan, va-t-elle changer la donne locale, voire régionale avec notamment la montée des périls en Irak et dans le Proche-Orient? En tout état de cause les Etats-Unis montrent une certaine inquiétude devant la fragilité qui semble être celle de l'Arabie saoudite face au terrorisme. Le secrétaire d'Etat adjoint américain, Richard Armitage, qui était dimanche en Arabie saoudite, n'a pas manqué pour sa part de pointer du doigt le réseau d'Oussama Ben Laden indiquant que l'attentat de samedi est «probablement l'oeuvre d'Al-Qaîda» soulignant que l'objectif de cette organisation «est de renverser le gouvernement saoudien mais aussi de susciter la peur et de répandre la terreur». En fait, l'Arabie saoudite pose un véritable dilemme pour Washington. D'une part ce pays, au poids spécifique en tant que premier producteur mondial de pétrole, a toujours privilégié une politique énergétique pro-américaine, mais dont la survivance des anachronismes, le non-respect des droits de l'homme, d'autre part, en font un Etat aux antipodes des libertés telles que préconisées par les Etats-Unis. Ce qui fait dire au sénateur républicain Chuck Hagel «(...) il ne fait aucun doute que les Saoudiens sont nos amis, mais ils vont devoir en faire davantage pour traiter le problème» du terrorisme. Compréhensifs, mais échaudés, les Etats-Unis usent maintenant de la carotte et du bâton avec Riyad à laquelle ils demandent des gages. Riyad qui a maintenant fort à faire à traquer les terroristes et dans le même temps à se mettre aux normes universelles de démocratie et de bonne gouvernance.